Title: Mémoire pour le service actuel des messageries
Dubious author: Bazile Durdan
Release date: July 22, 2006 [eBook #18890]
Language: French
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À PARIS,
DE L'IMPRIMERIE DE PRAULT,
Imprimeur du Roi, quai des Augustins.
M. DCC. XC.
Les voitures publiques sont une partie essentielle des domaines du Roi; elles doivent leur établissement à l'Université de Paris, & sont presque aussi anciennes qu'elle.
Elles furent d'abord établies pour conduire à Paris les personnes des Provinces qui vouloient y venir étudier. Les Messagers étoient responsables de la conduite, en route, des Étudians, au Recteur de l'Université, & aux Procureurs des nations qui la composent.
Le public prit confiance en eux, & se servit d'eux pour faire porter ses hardes, paquets & lettres; ils devinrent insensiblement les Messagers de l'État; leurs privilèges furent 6étendus. Ils jouissoient, entr'autres, de l'exemption des péages dus au Roi & aux Seigneurs, sur les fiefs desquels ils passoient. Ils ont participé & participent aux droits, privilèges & exemptions de l'Université.
La première institution des coches remonte à Charles IX. Ils ont d'abord été loués par des particuliers; mais bientôt ils obtinrent un privilège exclusif.
En 1576, Henri III établit, en titre d'office formé, des Messagers royaux, avec les mêmes privileges que les Messagers de l'Université.
En 1775, le Roi supprima les baux des différentes Compagnies qui, divisément, voituroient dans tout le royaume. Il réunit à son domaine toutes les différentes concessions; il fut établi une commission pour liquider les intérêts des propriétaires.
Ainsi avant 1775, les Messageries étoient exploitées par les Fermiers de ces différens concessionnaires ou propriétaires de privilèges de diverses parties de routes.
Ils n'étoient alors assujettis à aucun ordre uniforme d'administration; ils montoient leur exploitation comme ils le vouloient; ils n'étoient point obligés de correspondre avec les Fermiers des routes, qui ne les intéressoient pas. Ce n'étoient que des Messagers ayant la jouissance des privilèges, uniquement occupés de l'intérêt de leur ferme particulière, 7qu'ils faisoient valoir à leur manière & le plus à leur avantage.
Ces concessionnaires rendoient peu à l'État, & ne présentoient pas beaucoup de ressources au commerce & au public.
M. Turgot, qui avoit senti les avantages que le commerce & l'État devoient retirer d'une administration générale & uniforme, & toutes les ressources qu'elle procureroit au public & au commerce, se détermina à changer le régime ancien. Il fit établir des voitures conduites par des relais au train de la poste. Ce Ministre, revêtu du pouvoir de Surintendant général des postes, & Ministre des Finances, vit son établissement se former avec une célérité sans exemple.
Cet essai ne pouvoit être entamé qu'avec de gros fonds, qu'une Compagnie n'auroit pas osé exposer à l'incertitude du succès; il mit l'affaire en Régie, & choisit six Régisseurs pour la diriger pour le compte du Roi.
Le produit des baux passés par les anciens concessionnaires formoit un revenu d'environ 500,000 livres, dont 198,000 livres appartenoient à des particuliers, & seulement 302,000 livres au Roi.
Il auroit été difficile de concilier ces fermiers, & de les obliger à l'uniformité de ce nouveau régime d'exploitation. 8On ne pouvoit donc parvenir à former cet utile établissement, qu'en faisant rentrer au domaine du Roi toutes ces propriétés particulières; c'est ce qui fut exécuté.
En 1776, les anciens fermiers, dépossédés en 1775, auxquels il étoit dû de fortes indemnités, demandèrent au Ministre qui succéda à M. Turgot, Premier Bail. & obtinrent le bail général des Messageries, au prix de 1,000,000 livres par an.
Tous les équipages qu'ils avoient cédés au Roi en 1775, ainsi que ceux construits pendant la régie, leur furent remis, sans inventaire ni estimation, pour la somme de 1,200,000 livres seulement, & pour leur tenir lieu des indemnités qui leur étoient dûes, en raison de leur dépossession en 1775.
Ces fermiers, qui, avant 1775, n'avoient aucun rapport d'intérêt ni de correspondance entr'eux, se partagèrent en 1776 l'exploitation des différentes routes, & chacun voulut reprendre celle qu'il avoit eue avant la réunion: ils y fixèrent un prix qu'ils rapportoient à leur caisse commune, dont le total, formant le prix du bail général, étoit versé dans la caisse des postes, & ensuite au Trésor Royal.
9Toutes les opérations, ainsi que le service de toutes les routes du royaume, suivirent le régime établi par M. Turgot.
Le Ministre engagea ces fermiers à bâtir à leurs frais l'hôtel du Roulage, sur un terrein rue du Bouloir, loué par bail emphitéotique de 99 ans, pour l'exploitation du courtage du Roulage, ayant le privilége exclusif des entrepôts seulement.
Mais vers la fin de 1777, des spéculateurs, sans ressources personnelles, engagèrent des capitalistes imprudens à donner leur soumission au Ministre, offrant de se charger du bail des Messageries au prix de 2,200,000 liv. & de reprendre des fermiers, qu'ils vouloient déposséder, pour la somme de 1,200,000 livres seulement, le mobilier, qui n'avoit été cédé à si bas prix que pour leur tenir lieu des indemnités qui leur étoient dûes par le Roi.
La justice de M. Necker, alors directeur général des finances, lui fit rejetter ces offres.
Cependant il dût penser que les intérêts du Roi étoient lézés de plus de moitié.
Il fit part aux fermiers de ces propositions, & leur offrit de leur conserver le bail au prix de 1,800,000 liv.
10Ces fermiers, qui n'avoient joui de leur bail que pendant 19 mois, ne virent que deux partis à prendre, ou celui de tout abandonner & d'être ruinés à l'instant par l'obligation où ils seroient de remettre leurs équipages & effets, qui leur représentoient un capital de plus de 2,500,000 livres, pour le prix de 1,200,000 livres seulement, ainsi qu'ils leur avoient été cédés pour leur tenir lieu de toute indemnité; ou celui de prolonger leur existance, en acceptant la conservation du bail à un prix visiblement onéreux; mais sur l'espoir que justice leur seroit rendue, lorsqu'ils démontreroient, par des comptes exacts que le Ministre avoit été trompé, & que ce prix étoit insoutenable.
En effet, après deux ans de peines, de détresses & d'emprunts, ces fermiers se virent ruinés & forcés de recourir à la justice du Ministre, & de solliciter la résiliation de ce nouveau bail; justice qu'ils obtinrent après 27 mois d'une entreprise si visiblement ruineuse: ils furent admis à compter sur le pied seulement d'une redevance d'un million par an, au lieu de 1,800,000 livres; malgré cette réduction, les fermiers ont encore fait une perte considérable.
Au mois de Juillet 1780, le Ministre remit l'entreprise en Régie, qui fut confiée à six Régisseurs, dont trois 11choisis parmi les mêmes fermiers & trois autres particuliers, du nombre desquels étoit l'homme qui, en 1777, avoit osé proposer de porter le prix du bail à 2,200,000 liv.
On devoit s'attendre de voir prospérer les produits de cette Régie, qui n'avoit qu'à s'occuper des moyens d'amélioration, d'ordre, de facilités & d'utilité pour le bien & la commodité du service du Public, & pour l'avantage & la circulation du commerce. Tout devoit concourir à la prospérité de cette Régie; nul risque à courir pour le compte des Régisseurs; point de fonds à exposer, le Trésor Royal y pourvoyoit: assurés de la protection ministérielle pour le maintien des priviléges & des droits; aidés de l'autorité de l'Intendant des postes, pour obliger les Maîtres de poste à conduire leurs voitures aux prix modérés qu'il leur avoit fixés; cependant l'intérêt ni le zèle n'inspirant aucune idée d'amélioration dans le service, les résultats n'en furent pas satisfaisans: le Ministre supprima cette Régie le premier Octobre 1782.
L'expérience de deux Régies décida le Ministre au parti de leur préférer une ferme.
Plusieurs compagnies se présentèrent; le Ministre se détermina à donner la préférence aux fermiers actuels, au prix de 1,100,000 livres. Cette ferme, sous le nom de Ducessois, a duré jusqu'au premier Janvier 1788. À 12Bail passé à Durdan en 1788. cette époque, il a été passé bail à une nouvelle Compagnie, sous le nom de Durdan, lequel ne doit finir qu'au premier Janvier 1797.
La ferme de Ducessois a éprouvé bien des contradictions & des pertes.
Lorsque cette Compagnie se chargea de cette entreprise, elle ne connoissoit pas les dangers qu'elle alloit courir par le mauvais état dans lequel on la lui remettoit, & elle ne pouvoit pas prévoir les événemens de force majeure qu'elle éprouveroit, ni tous les changemens qu'elle seroit obligée de faire pour réformer les vices invétérés des anciens usages des précédentes exploitations.
La Régie à laquelle elle succédoit lui livra une grande quantité de chevaux, mais exténués & presque tous à réformer; par conséquent elle se vit obligée, dès son entrée en jouissance, à des remplacemens considérables, & d'autant plus chers, que les besoins étoient pressans à l'entrée d'un hiver si pluvieux que les chemins étoient devenus impraticables; à la seconde année, il ne lui restoit pas 200 chevaux des 1010 qu'elle avoit reçus de la Régie.
Les Fermiers avoient été obligés de reprendre toutes les voitures des anciennes Messageries que M. Turgot avoit fait réformer en 1775, & qui n'ont jamais servi depuis; celles qui étoient en activité étoient d'une construction si 13lourde, que les Maîtres de poste, qui avoient été forcés par l'autorité de les conduire, refusèrent absolument de continuer ce service, aussi-tôt qu'ils apprirent que les Messageries étoient en ferme, quoique les conditions du bail fussent que les Maîtres de poste continueroient pendant un an cette conduite, aux mêmes prix que ceux de la Régie. Cette contradiction, pour laquelle ils ne purent obtenir justice ni protection, exposa les fermiers à l'inquiétude de voir le service public au moment d'être interrompu. Ce ne fut qu'à force de sacrifices d'argent, qu'ils engagèrent les Maîtres de poste à ne pas leur refuser leur secours, & en envoyant des chevaux dans les endroits où absolument ils s'y refusèrent.
Les Fermiers se déterminèrent bientôt à faire construire d'autres voitures, d'une forme plus légère & plus commode; ils en firent venir d'Angleterre pour leur servir de modèles; & en deux années, ils parvinrent à monter la plus grande partie de leurs routes en nouvelles voitures, & à renouveller tous leurs chevaux.
La première année avoit été ruineuse, par les remplacemens de chevaux & de voitures, par les dépenses extraordinaires que les refus des Maîtres de poste leur avoient occasionnées, & par l'état des chemins que les pluies avoient rendus impraticables. La seconde fut encore plus désastreuse, par l'abondance des neiges & la rigueur 14de ce long hiver, & par les efforts considérables qu'ils firent pour satisfaire aux transports d'espèces & de piastres dont le Gouvernement avoit le plus grand besoin; ce qui détermina les Fermiers à tripler le nombre de leurs chevaux & voitures, pour, malgré les obstacles des neiges, faire arriver de Bayonne au Trésor Royal jusqu'à 2 millions par semaine.
Enfin, la troisième année fut la plus malheureuse & la plus chère de toutes, par la perte totale des récoltes, ce qui fit monter les fourrages à des prix où jamais on ne les avoit vus.
C'est au milieu de ces désastres que les Fermiers ne perdirent pas courage & qu'ils ne cessèrent de s'occuper des changements à faire dans leur service, pour lui donner plus d'activité, d'ensemble & d'utilité pour le Public & pour le commerce.
Ils avoient éprouvé les inconvénients de la dispersion de leurs établissements dans les différents quartiers de Paris, tant pour leur surveillance que pour le Public.
Ils présentèrent au Ministre un Mémoire pour obtenir l'autorisation de réunir dans un seul local au centre de Paris, tous leurs bureaux d'exploitation, d'administration & de comptabilité, & même tous leurs ateliers de constructions, afin d'avoir tout sous leurs yeux, & que le 15Public eût un seul point de réunion & n'eût plus à courir les quatre coins de Paris, lorsqu'il auroit des renseignements à demander.
Ce plan plut au Ministre, il l'approuva & il fit rendre un arrêt du Conseil, qui autorisa les Fermiers à donner congé de toutes les maisons dispersées que la Régie avoit louées, ils payèrent une année de dédommagement aux propriétaires de ces maisons.
Les Fermiers firent l'acquisition de l'hôtel Boulainvilliers, pour y établir tous leurs bureaux, ils louèrent pour 18 ans le terrein des Petits-Pères, sur lequel ils firent construire les bâtiments convenables aux atteliers de tous les travaux de leur exploitation.
M. Turgot avoit eu ce projet de réunion; il vouloit acheter l'hôtel Bouillon & une grande partie du terrein des Petits Augustins qui y est contigu: ce projet étoit beau, mais l'exécution auroit coûté quatre fois plus que n'a coûté celui qui existe aujourd'hui & qui remplit l'objet à la satisfaction du Public.
Tous ces travaux ont été achevés en moins d'une année & les bureaux établis.
Ils ont coûté aux Fermiers avec l'acquisition de l'hôtel, près de 1,300,000 livres.
Les plans en furent mis sous les yeux du Roi après que 16le Ministre eut visité & applaudi à tous les détails, à son exécution & à son utilité. Le Roi en fait l'acquisition. Le Roi consentit à en faire l'acquisition, mais sous la condition que Les Fermiers chargés de toutes les réparations & entretiens. les Fermiers & leurs successeurs seroient chargés des entretiens & réparations grosses & menues comme s'ils en restoient propriétaires, & ensorte qu'il n'y eût jamais aucune dépense à sa charge.
Alors les mémoires de ces constructions n'étoient pas encore réglés; on évalua que l'acquisition & ces bâtiments pourroient faire un objet de dépense de 1,100,000 liv. Le remboursement de ces avances, fait en huit années. & il fut convenu que le remboursement en seroit fait aux Fermiers en huit années par déduction annuelle sur le prix du bail, moyen insensible & très-avantageux que celui d'acquérir une grande & utile propriété par le sacrifice d'une légère portion de ses revenus; mais il laisse les Réclamation des Fermiers de l'excédent de dépenses des constructions. Fermiers à découvert d'une dépense excédente de 184,000 livres & des intérêts de leurs avances pendant huit ans: chargés en outre d'une dépense annuelle de près de 20,000 livres pour les réparation & entretien.
Les Fermiers attendent une décision sur le remboursement qu'ils réclament pour cet excédent seulement de l'évaluation des constructions.
Cet utile & bel établissement achevé, les Fermiers s'occupèrent des moyens de donner à leur exploitation l'étendue 17dont elle étoit susceptible & qui avoit toujours été négligée, quoique nécessaire & avantageuse au Public & au commerce. Des communications & la correspondance des voitures de la ferme avec celle des pays étrangers, leur semblèrent devoir mériter leur première attention.
Le premier établissement de ce genre qu'ils ont fait, a eu le plus grand succès, c'est la correspondance avec l'Angleterre.
Ils firent un traité avec une compagnie Angloise, par lequel on s'engagea réciproquement à se remettre les voyageurs, les effets & marchandises à jours fixes, en sorte que le bureau François établi à Londres & ceux établis à Paris ont la même correspondance que celle de Paris avec les autres villes de l'intérieur de la France. Un voyageur partant de Paris pour Londres, & de Londres pour Paris, est voituré & nourri moyennant cinq louis ou cinq guinées, le passage de la mer compris. Les Entrepreneurs anglois, ainsi que les Fermiers françois, sont garans des événemens. Les produits se partagent dans la proportion que chaque nation parcourt, & chacun fait & supporte sa dépense.
Les Fermiers, connoissant l'habitude des Anglois, ont fait construire en Angleterre plusieurs voitures qui leur ont servi de modèles, & ils ont monté la route de Calais toute en voitures angloises. Cet établissement se soutient avec la plus grande prospérité, & a l'entière satisfaction des deux nations.
18La même communication est établie avec Bruxelles, les Pays-Bas & la Hollande, par Valenciennes, & avec Liége, par Mézières & Givet.
Les Fermiers ont été arrêtés dans l'exécution de leur plan de communication avec toute l'Allemagne, par les obstacles qu'oppose le régime vicieux du service particulier à l'Alsace, service indépendant de l'administration des Fermiers, & qui nuit beaucoup à l'avantage & à la sûreté d'une correspondance qui s'étendroit considérablement, mais qui pourra s'établir comme les autres provinces de France, lorsque la Constitution sera déterminée sur le service général des Messageries du royaume.
Il y avoit un établissement formé entre Lyon & Genève; les Fermiers en ont monté un par la Bourgogne & la Franche-Comté, de concert avec le magnifique Sénat.
Ils ont fait un traité avec un Entrepreneur des Messageries en Espagne, pour que son service fût monté en relais de Madrid à Bayonne, afin de correspondre avec les Messageries de France.
Tel est l'état actuel du service des Messageries; on ne peut disconvenir que les Fermiers n'ayent été occupés des moyens de lui donner une grande activité & beaucoup de 19facilités pour les communications intérieures du Royaume & pour celles des Nations étrangères.
C'est à ce zèle soutenu & à l'utilité de leurs établissemens, qu'ils doivent la justice que les Ministres leur ont rendue, & qu'ils en ont obtenu des dédommagemens sur les pertes qu'ils ont éprouvées; dédommagemens qui avoient des motifs bien légitimes, comme on pourra en justifier par le détail & l'emploi qui en a été fait.
L'utilité du service des Messageries ne sauroit être mis en question; son ensemble met une uniformité de principes & de régime, dont la division, si on y pensoit, feroit bientôt reconnoître les grands inconvéniens qui en résulteroient contre le Commerce & le Public.
En effet, le Commerce & le Public sont assurés de leurs départs aux jours indiqués; ils le sont également de leurs retours: aucun événement ne peut en interrompre l'exactitude & la marche: que les voitures soient vuides de monde, & d'effets, il ne faut pas moins qu'elles partent.
La sûreté des objets confiés aux Messageries est un avantage précieux & tranquillisant pour le Public; la responsabilité des fermiers, tant de leur fait que de celui de leurs Commis & de leurs Sous-fermiers, a souvent coûté cher 20à la Ferme générale: pertes, avaries, incendies, vols, infidélités des sous-ordres, erreurs, tout tombe à leur charge; il est tels événemens qui peuvent ruiner une Compagnie. Cette responsabilité est appuyée sur un fonds d'avance de 1,100,000 livres, versé au Trésor Royal; les effets de l'exploitation qui représentent une valeur de 14 à 1,500,000 livres, & la solidarité de la fortune de six personnes qui composent la Compagnie.
On peut ajouter à tous ces risques, les contrariétés des saisons, l'abondance des neiges, les glaces, les inondations, les chemins rompus par une suite de ces fléaux, les obstacles à vaincre & qui occasionnent des frais extraordinaires & considérables: les disettes des récoltes, la cherté qui s'en suit, & d'autant plus aggravante, que ce service exige une grande quantité de chevaux, & qu'il faut encore en augmenter le nombre dans ces tems malheureux, parce qu'aucun obstacle ne doit ralentir leur service: les Rouliers & ceux qui n'ont aucun engagement forcé à remplir, qui ne rendent rien à l'État, ne courent aucun de ces dangers; ils sont les Maîtres des prix de leurs voitures; ils sont libres de diminuer ou même de démonter leurs équipages; rien ne les lie ni vis-à-vis du Gouvernement, ni vis-à-vis du Public; ils cessent lorsqu'ils ne trouvent pas de profit à les servir. Les Messageries ont des prix réglés par la loi; ils ne peuvent pas les augmenter: on sait même qu'ils accordent 21des modérations, & ils n'ont aucun prétexte pour cesser ni interrompre leur service.
Ce sont toutes ces obligations qui ont fait sentir l'indispensable nécessité de donner des priviléges à l'exploitation des Messageries.
Après avoir fait connoître les obligations des Fermiers, les dangers auxquels leur fortune est journellement exposée, les engagemens qu'ils ont à remplir vis-à-vis du Gouvernement, l'utilité & les avantages de leur service, sa régularité, la responsabilité vis-à-vis du Public & du Commerce, on ne peut s'empêcher de convenir que, sans un privilége, les Messageries ne pourroient pas soutenir la concurrence des Rouliers ou autres qui auroient la faculté de tout transporter sans aucune obligation quelconque.
Cette liberté indéfinie, si on l'accordoit, seroit d'ailleurs très-préjudiciable au Commerce, incommode au Public voyageur, très-dangereuse pour la sûreté des effets précieux dont on chargeroit les Rouliers, très-abusive pour les exportations d'espèces, d'aucune ressource dans nombre de circonstances, embarrassante & incertaine pour les communications dans tous les sens du royaume, nulle suite, nulle utilité pour la correspondance relative aux intérêts du Commerce, aucune autorité pour maintenir l'ordre & la sûreté, point de responsabilité, défaut de moyens 22pour y satisfaire, plus de réunion, plus d'uniformité, plus d'ensemble, point de règle ni de principes dans l'exploitation, le Public ne sachant à qui s'adresser peut se faire rendre justice, pour avoir seulement des renseignemens sur des objets égarés ou retardés en route; tous ces avantages qu'on ne peut trouver que dans une administration bien-montée, bien établie, subordonnée à des loix, sous la main de l'autorité, ne peuvent être détruits, sans que le Commerce & le Public n'en ressentent bientôt le danger & n'en réclament le rétablissement.
Cependant on voudroit persuader que les priviléges des Messageries gênent le Public & nuisent au Commerce; on présente un fantôme pour le combattre.
Voyons donc en quoi consistent ces priviléges des Messageries, & s'ils sont nuisibles & même gênans. Il faut les analyser.
Ils consistent, 1°. à conduire les voyageurs.
2°. A faire les transports des espèces & des matières d'or & d'argent.
3°. A transporter les prisonniers & les papiers de procédures & exécutoires.
4°. A transporter les petits paquets de cinquante livres & au-dessous.
5°. A avoir des relais pour la conduite des voitures.
23Le transport seul des voyageurs oblige à un droit de permis que les loueurs doivent payer à la Ferme, & ce droit est le tiers du prix que l'on payeroit dans les Messageries.
Des différentes parties qui constituent le privilége des Messageries, le droit de permis est celui qui a été le plus vivement attaqué, & peut-être même le seul qui ait donné lieu aux réclamations consignées dans les cahiers de quelques Provinces.
Les particuliers, à qui la perception de ce droit a dû paroître onéreuse, l'ont considérée comme une inquisition vexatoire qui gênoit la liberté, & n'ont pas fait attention qu'ils devoient y être étrangers, le loueur seul étant assujetti & devant se conformer aux réglemens rendus à cet égard, & le soin d'un voyageur pouvant se borner à s'assurer que celui qui le conduit a satisfait à la loi, pour s'éviter à lui-même le désagrément de se voir arrêté en route, & être le témoin de procès-verbaux, qui, dans tous les cas, sont à la charge du loueur. L'on ne se dissimule pas l'objection qui se présente d'elle-même, qui est, que le loueur étant tenu d'acquitter le tiers du prix fixé par le tarif de la place qu'auroit occupée le voyageur dans la voiture publique qui fait le service de la route qu'il parcourt, il doit trouver son dédommagement dans l'augmentation de prix qu'il exige 24du particulier pour le conduire, & qu'alors c'est sur ce dernier qu'en retombe la charge; mais on peut répondre:
1°. Qu'on ne croit pas possible (en supposant la suppression du droit de permis) de maintenir un service régulier de Messageries dans le Royaume, même sans l'assujettissement à un prix de bail quelconque, & la raison en est que la concurrence illimitée qui s'établiroit nécessairement, mettroit tout le désavantage du côté de celui qui ne pouvant pas se soustraire au réglement, seroit tenu de l'entretenir d'un nombre déterminé de chevaux & de voitures, & de partir & arriver à jours & heures fixes, tandis que le loueur pouvant, au gré de son intérêt, étendre ou resserrer ses spéculations, ne partir que lorsqu'il seroit dans le cas de faire un voyage utile, se porter aux lieux qui favoriseroient le mieux son industrie, retireroit seul tout l'avantage de cette concurrence, & telle seroit probablement la suite de cette liberté générale, que les Messageries dégoûtées d'un service ruineux, demanderoient à être déchargées d'une obligation onéreuse, & qu'alors les loueurs, maîtres du champ de bataille, exempts de tout assujettissement aux réglements & au tarif, s'entendant entr'eux sur les routes qu'ils fréquenteroient, imposeroient au Public des conditions arbitraires & abusives.
L'expérience démontre cet état de choses en Provence, 25où il n'est pas rare de voir que les voituriers exigent au moment des besoins, jusqu'à 24 liv. par personne, pour faire 12 à 15 lieues.
2°. L'on peut répondre en second lieu, que s'il résulte du droit de permis l'inconvénient d'une augmentation de frais pour celui qui prend la voye des loueurs, il peut en trouver le dédommagement dans l'avantage & les facilités que lui présentera dans plusieurs occasions l'établissement du service régulier des Messageries, & en supposant tel particulier qui ne fut jamais dans le cas d'y avoir recours, l'intérêt de quelques individus isolés doit-il entrer en balance avec celui de la majeure partie des habitants d'un royaume? C'est un sacrifice qu'il fait alors au bien commun & qui l'assure de sa participation aux mêmes avantages s'il se trouvoit dans le cas d'en faire usage.
On a conçu le projet d'un réglement général qui pareroit aux inconvéniens des interprétations différentes des arrêts, réglements & ordonnances rendus sur le fait des Messageries; il en préviendroit les abus en simplifiant les loix & éclaireroit sur les obligations des Fermiers & du Public.
Si l'abandon du droit de permis n'entraînoit qu'une diminution plus ou moins sensible dans le produit des Messageries, il n'est point d'administration ou de Fermier qui ne se fît un devoir d'aller au devant des vœux énoncés à cet égard par quelques Provinces; mais, comme on l'a déja 26dit, & comme doit le faire préjuger l'expérience de ceux qui sont dévoués à cette partie d'administration, ce droit anéanti, il n'existe plus de base, plus de balance entre les moyens libres des loueurs & ceux obligés des Messageries.
Si donc on ne peut pas sans danger, non seulement pour les finances du Roy, mais même pour la sûreté de la continuation d'un établissement utile, proposer l'anéantissement de cette perception, l'on doit se borner à chercher les modifications & les moyens possibles de la rendre moins gênante & moins sévère, & l'on soumet ceux-ci, quoique incertains s'ils seront capables de remplir ce but.
L'intérêt pécuniaire a quelque part aux réclamations qui se sont élevées contre le droit de permis; il n'est pas douteux qu'elles n'aient été provoquées plus puissamment encore par les désagrémens qu'éprouvent souvent les voyageurs, qui, dans l'ignorance des réglemens, & ne connoissant que le marché qu'ils ont fait avec le loueur, se voient arrêtés dans leur course par les préposés à la conservation du droit, se trouvent victimes de la contravention de celui qui les conduit, & soumis, par une suite de formes, à des retards & souvent à des scènes désagréables.
On pourroit proposer, à l'exemple de l'Angleterre, une taxe sur les loueurs, relative au nombre de chevaux & à l'espèce de voitures qu'ils emploieroient.
27La permission, qu'en Angleterre on nomme licence, qui leur seroit délivrée à raison de cette taxe, seroit renouvellée tous les ans & le produit qui en résulteroit tournant au profit des Messageries, pourroit les dédommager en partie de la privation journalière du droit de permis, en même tems qu'il maintiendroit la balance dans les prix.
Il ne faut pas croire que la ferme se trouvât dédommagée par une pareille taxe; ce n'est pas tant le produit individuel du droit de permis qui intéresse: environ 70,000 l. par année pour la Ferme générale, & 50,000 livres pour les Sous-fermiers, pourroient dédommager de l'abandon de ce produit annuel; mais cette perception, qui fait le contrôle & la surveillance sur les loueurs, & les peines qui suivent la conviction de la fraude, assurent aux voitures des Messageries un nombre suffisant de voyageurs pour payer les frais qu'elles sont obligées de faire, qu'elles aient ou qu'elles n'aient pas de voyageurs.
On observe que tout le monde voyage en Angleterre & sans bagage; peu de monde voyage en France, par comparaison; mais le François a toujours beaucoup de bagage. Il n'y a que trois ou quatre mois de l'année pour les semestriers & la saison des campagnes; en Angleterre il y a une quantité immense de chevaux; les fourrages y sont à très bas prix; chacun y fait des élèves, c'est un commerce considérable, & on est sûr de les occuper par l'affluence des voyageurs. 28Les chemins sont beaux dans toute l'Angleterre; en France, ils sont montueux & d'un entretien plus difficile.
En Angleterre, deux chevaux conduisent trois voyageurs, & quatre en conduisent six dans l'intérieur, & six sur l'impériale. Les chevaux sont d'une espèce plus forte & plus nerveuse qu'en France; ils sont soignés avec une attention extrême, que n'ont pas nos postillons & nos palefreniers; l'espèce & la force des chevaux en France varient dans chaque canton. Les postes sont montées en chevaux de petite taille, & on a aujourd'hui beaucoup de difficultés à en trouver de taille propre au tirage des fourgons & coches. En Angleterre, les postes sont montées en chevaux de cinq pieds & au-dessus; les wagons, ou voitures de roulage, sont attelés de chevaux de la plus grande taille.
Si ce projet de taxe sur les loueurs, qu'on ne fait qu'indiquer dans ce moment, paroissoit de nature à pouvoir être accueilli, on chercheroit les moyens de le mettre à exécution.
Si on croit devoir le rejetter, voici les modifications qu'on peut proposer dans l'état actuel des choses.
Les divers réglemens concernant le droit de permis, peuvent paroître minutieux & sévères à ceux qui n'ont point l'expérience des ruses que sait employer la fraude, à l'ombre de quelques facilités. Ce sont les connoissances successivement acquises sur les moyens frauduleux, qui ont 29fait sentir la nécessité d'étendre l'obligation de l'acquittement du droit à tous les cas prévus par les réglement; & il est constant que proposer des modifications sur le droit tel qu'il existe, c'est ouvrir la porte à de nouveaux abus & à des pertes sensibles. L'on pense cependant que moyennant une déduction annuelle sur le prix du bail & indemnisant les Sous-fermiers, les Messageries pourroient restreindre l'exercice de ce droit, 1°. en faveur des gens peu fortunés qui se font, au moyen d'une légère rétribution, une ressource des charrettes qu'ils trouvent dans leur chemin; 2°. en faveur des soldats, pionniers, matelots, &c.; 3°. en faveur des citoyens qui, domiciliés dans les villes & propriétaires de maisons de campagne dans les environs, y sont appellés par leur plaisir ou leurs affaires.
Ces exceptions, en tournant principalement à l'avantage de la classe la plus indigente, présenteroient le double avantage de rendre infiniment moins fréquentes les contraventions & les saisies, & de n'avoir à exercer de surveillance que sur ceux qui, par leur consistance dans la société, sont plus en état d'apprécier les motifs qui ont dû engager le Gouvernement à imposer la gêne du droit de permis.
Le privilége du transport des espèces & matières d'or & d'argent, ne peut assurément pas être considéré comme un droit gênant & qui attaque la liberté. Il donne, par le 30service des Messageries, au Commerce & sur-tout au Gouvernement, de grandes facilités, de la célérité, de l'exactitude & des sûretés.
Des Rouliers pourroient-ils présenter autant de moyens que les Messageries; responsabilité, célérité, jours fixes & invariables de départs & d'arrivées, doublement de forces, lorsque les besoins du Commerce & du Gouvernement exigent qu'on les procure; compositions toujours beaucoup au-dessus des prix fixés par les tarifs; connoissances nécessaires des exportations & des importations, secret dans les expéditions? Oseroit-on confier des objets aussi importans à des Rouliers isolés, à des Commissionnaires qui ne peuvent jamais présenter assez de sûretés, ni procurer autant de ressources & de moyens? Sans ces sûretés, & sans l'avantage de l'exactitude & de la régularité des expéditions, les Négocians seroient souvent exposés à voir manquer leurs opérations & à compromettre leur crédit & leur fortune.
Le privilége du transport des prisonniers, des exécutoires & des papiers de procédures, ne touche aucunement à la liberté, ni à l'intérêt public & du Commerce: il assure la fidélité & l'exactitude de la remise des procédures, & répond de la sûreté des prisonniers.
Le privilége du transport des petits paquets, réduit au poids de cinquante livres & au-dessous, ne peut pas nuire 31à l'intérêt ni aux spéculations du Commerce. Le Public & le Commerce sont libres de faire voiturer par qui bon leur semble tous les effets, ballots & marchandises au-dessus du poids de 50 livres; mais les petits objets que le commerce est presque toujours intéressé à faire parvenir avec célérité, se transportent par les Diligences; ils ne sont pas du ressort des Rouliers, & ne les intéressent pas assez pour leur donner la faculté de s'en charger, au détriment des Messageries, dont d'ailleurs la forme de leurs voitures garantit la sûreté, non-seulement au Commerçant, mais encore plus à la classe indigente des Citoyens. Ces petits objets sont aussi trop souvent livrés aux Couriers des dépêches, sur-tout les bijoux & effets précieux, même les espèces d'or, dont la fraude fait un tort considérable aux Messageries, augmente beaucoup le poids de la malle, surcharge dont les Maîtres de poste se plaignent journellement. Les soldats, les matelots, les ouvriers & journaliers sont assurés qu'ils retrouveront leurs effets dans les dépôts des Messageries; avantage qu'ils n'ont pas en les confiant à des Rouliers qui n'ont guères d'intérêt à leur conservation; ils ne sauroient même à qui s'adresser pour les retrouver, ou les faire payer s'ils étoient perdus ou avariés. Ce privilége est très-essentiel aux Messageries, & ne nuit à personne.
Le privilége d'avoir des relais n'appartient qu'aux Postes 32& aux Messageries. Cette faculté exclusive ne nuit pas au Public: il procure la célérité à la marche des voitures; il répand beaucoup d'argent dans les Provinces; il alimente le service des Maîtres de poste; il consolide le privilége des Diligences, & c'est lui qui a fait porter le produit des Messageries à 1,100,000 livres, de 302,000 livres qu'il rapportoit avant que M. Turgot eût établi les Diligences.
Il n'est pas possible de se persuader que l'on ait jamais l'intention de détruire l'établissement des Messageries, arrivé au point de perfection où il est aujourd'hui, & cela par l'espoir de le remplacer plus avantageusement par un nouveau régime qui affranchisse le Public & le Commerce de la prétendue gêne de ses priviléges; mais on ne doute pas aussi que tous les avantages du régime actuel ne soient mis en opposition avec les inconvéniens que l'on lui suppose, & que l'on ne s'assure bien, avant de se décider à faire aucun changement dans cette partie d'administration, si le nouveau régime donnera autant de sûretés, de facilités, de ressources & d'ordre dans son ensemble.
On observe en général & on en a déjà éprouvé les effets, que les destructions, les essais & les changements sont souvent dangereux & occasionnent toujours des dépenses considérables au gouvernement. La suppression du 33bail actuel des Messageries coûteroit d'autant plus qu'outre le remboursement de 1,150,000 livres d'avances, l'acquisition de 3,000,000 livres des effets & équipages tant aux Fermiers qu'aux sous-Fermiers, il faudroit encore ajouter l'indemnité pour la privation de sept années de jouissance, qui feroit un objet de 2,666,000 livres, à répartir tant aux fermiers Généraux qu'à leurs sous-Fermiers.
On joindra à ce Mémoire un tableau des recettes & des dépenses de l'exploitation des Messageries depuis 1775. L'opinion qu'assez généralement on a cherché à répandre dans le Public, des dépenses qu'elles coûtent à l'État est si fausse, qu'il est nécessaire & facile de démontrer l'erreur dans laquelle on est resté: on n'acquiert pas une augmentation de revenus de 798,000 livres, & des propriétés considérables sans qu'il en coûte; cependant, lorsque des propriétés restent, que les revenus sont certains, que l'on pourroit les voir encore s'accroître & que les fonds mis en avant sont rentrés, on ne peut pas disconvenir qu'une pareille administration n'ait au contraire été très-utile au Gouvernement.
Si les détails & les faits consignés dans ce Mémoire peuvent concourir à prouver la nécessité de la continuation de l'établissement des Messageries en France, si l'on a démontré que le peu de gêne résultante du Privilège, est balancé avec une supériorité déterminante par les avantages 34qu'il procure, & qui ne pourroit exister sans lui, les Fermiers actuels croiroient cependant n'avoir atteint qu'une partie du but qu'ils se sont proposé, si l'on pouvoit penser que les réflexions qu'ils soumettent à l'Assemblée Nationale, n'ont été dictées que par un motif d'intérêt personnel. Quelle que soit leur méfiance sur les projets de changements & d'améliorations qui sont venus jusqu'ici à leur connoissance, ils sont trop persuadés que s'il est des moyens de rendre cet établissement plus utile au Public & plus avantageux aux finances de l'État, ils ne sauroient échapper aux lumières réunies des augustes Représentants de la Nation. Soit qu'ils jugent à propos de laisser subsister le régime actuel, soit qu'ils croyent devoir en adopter un autre, les Fermiers s'estimeront heureux de pouvoir seconder leurs vues. Ils ont la confiance de penser qu'ils y seroient admis de préférence; & que l'expérience qu'ils ont acquise par un travail long & constant, autant que les dédommagements qui seroient légitimement dûs à une dépossession, sollicitent également cet acte de faveur & même de justice.
Les variantes d'orthographe (privilège/privilége, etc.) sont conformes à l'original.