Title: L'Illustration, No. 3271, 4 Novembre 1905
Author: Various
Release date: July 9, 2011 [eBook #36676]
Language: French
Credits: Produced by Jeroen Hellingman and Rénald Lévesque
L'Illustration, No. 3271, 4 Novembre 1905
Ce numéro contient:
L'ILLUSTRATION THÉÂTRALE avec le texte complet du
Masque d'Amour, par Daniel Lesueur.
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE EN PORTUGAL
L'arrivée à
Lisbonne: M. Loubet et le roi Carlos, dans le carrosse de Jean V, se
rendent de la gare au palais de Belem. Dessin d'après nature de Georges
Scott.
Nous publierons successivement dans nos numéros de novembre et décembre:
LA MARCHE NUPTIALE, par Henry Bataille;
LES OBERLÉ, par Edmond Haraucourt, d'après le roman de René Bazin;
LA RAFALE, par Henry Bernstein;
BERTRADE, par Jules Lemaitre.
Nous commencerons, le 18 novembre, la publication d'un nouveau roman de J.-H. Rosny: LA TOISON D'OR.
Nous sommes des ingrats. J'ai feuilleté, cette semaine, un grand nombre de journaux; je n'ai pas vu qu'on s'y apitoyât beaucoup sur le sort de ce pauvre Foottit, dont une dépêche anglaise nous contait--en deux lignes, d'ailleurs--l'aventure tragique: le plus joyeux des clowns était, paraît-il, devenu subitement fou. Le petit homme dont la silhouette bouffonne et les cabrioles éperdues égayèrent si longtemps nos cirques parisiens, et à qui tant d'enfants durent de si précieuses minutes de joie, enfermé dans un cabanon d'aliénés! Triste fin. Parmi ces milliers de gamins que Foottit amusa, et qui sont devenus des hommes, il y en a bien, je suppose, quelques-uns que le hasard a faits journalistes. J'aurais souhaité qu'ils parlassent de Foottit avec plus de gratitude. Car elle doit être lamentable, cette profession d'amuseur quand même et j'imagine ce qu'il peut y avoir de mélancolie atroce, par moments, au fond d'une âme de pitre. Faire rire! Accomplir le devoir quotidien d'être comique, et ne pouvoir subsister qu'à la condition d'offrir à la vue de la foule le spectacle ininterrompu des pirouettes et des grimaces qu'elle aime; être un homme comme tous les autres--que menacent les pires tristesses humaines--et, quoi qu'il arrive, demeurer uniquement, éternellement, en face de cette foule, «l'homme qui rit»... C'est, en effet, de quoi devenir fou. Mais le bon clown nous télégraphie à l'instant que la nouvelle est fausse. Tant mieux! Foottit n'était que très malade et se contentera de rester l'un des hommes les plus moroses de son temps...
Car si tous, heureusement, ne perdent point la tête à ce dur métier-là, presque tous y laissent leur gaieté. J'ai souvent remarqué l'air mélancolique des comédiens que leur «emploi» confine dans les rôles de bouffonnerie pure; et aussi de la plupart des humoristes dont le rôle, en littérature, est de nous faire rire. Le bon Alphonse Allais, qui vient de mourir, fut un de ces humoristes-là; et je ne me souviens pas d'avoir rencontré sur le boulevard de figure plus étrangement attristée que la sienne. On me dit qu'il était fort instruit. Qui sait si la vague ambition de conquérir la gloire par des moyens «graves» ne hanta point cet amuseur? Mais ce rêve-là lui était interdit. Nous sommions Allais d'être drôle quotidiennement: c'était sa fonction, et sa raison d'être; pendant vingt ans, nous avons condamné cet homme paisible à trouver tous les soirs l'idée «drôle» sur quoi Paris devait s'esclaffer le lendemain, et pendant vingt ans il est demeuré fidèle à cette consigne. On a raconté que, la veille de sa mort, agité d'un pressentiment sinistre, il dit à un ami qui lui demandait des nouvelles de sa santé: «Je mourrai demain.» Le mot fit rire. On trouva plaisant ce propos d'Allais. Tous les propos d'Allais n'étaient-ils point nécessairement plaisants? Et le lendemain il était mort, comme il l'avait dit. L'étonnement fut immense; on ne comprenait pas qu'Allais se fût pris lui-même à ce point au sérieux.
Pauvres auteurs gais, comme je comprends qu'ils aient l'air triste!
*
* *
... Rentrée des Chambres. En revenant du Salon d'automne, je me suis arrêtée un instant au milieu des groupes de badauds qui couvraient le trottoir, aux abords du Palais-Bourbon. C'est un des amusements favoris du Parisien que de reconnaître au passage les grands hommes dont il trouve tous les matins les noms dans son journal et les têtes aux vitrines des marchands de photographies. Autour des mieux renseignés--visiblement fiers de leur savoir--les plus ignorants s'empressent, écoutent, suivent de l'oeil avidement les figures qu'on leur désigne: «Tenez, ce grand-là, c'est Ribot... Voici Deschanel... Voulez-vous voir Jaurès? Attendez... il se retourne; il dit bonjour à Pelletan... Je crois bien que c'est Clémentel qui vient de passer, mais je n'en suis pas sûr... Vous ne connaissez pas Berteaux? Regardez là-bas le gros qui rit et qui donne des poignées de main à tout le monde...» Les agents nous repoussent un peu, car nous devenons encombrants. Et la foule des parlementaires continue d'arriver. Des fiacres, des locatis, beaucoup d'automobiles, quelques coupés joliment attelés défilent au fond de la petite cour d'entrée, le long du perron où s'empressent les ouvreurs de portières et les huissiers. Des rires, des appels, des poignées de main, un brouhaha de fête. Au milieu de cette cohue, un bras levé s'agite vers moi: «Bonjour, madame!--Bonjour, cher ami.» C'est B..., ancien professeur de l'Université, doyen du corps des informateurs parlementaires: un vieux camarade qui a la bonté de m'introduire au Palais-Bourbon, les jours de «grande séance». Il m'entraîne sur le quai et nous bavardons.
--D'où venez-vous? Du Salon d'automne? C'est bien, ça. Mais moins amusant que ce salon-ci, dit-il en montrant du doigt la façade du palais.
--Vous aimez, dis-je à B..., le tapage qu'on fait là-dedans?
--J'aime tout ce qui se fait là-dedans: le bruit qu'on y mène, et les bêtises qu'on y dit.
--Vous appelez bêtises, je suppose, les opinions de vos adversaires?
--Je n'ai pas d'adversaires, madame; et cela tient à ce que je n'ai pas non plus d'opinions. Je suis un philosophe qui s'amuse au spectacle des passions des autres et qui regarde avec une émotion reconnaissante s'entre-dévorer les partis.
--Je ne comprends pas...
--Voici: nous constatons qu'il n'existe aucun parti politique assez vertueux pour n'être pas tenté, dès qu'il est le plus fort, d'abuser de sa force. En conséquence, il est excellent qu'en face de ce péril-là des résistances s'organisent; et c'est donc un peu l'intérêt de tout le monde qu'il y ait des politiciens qui se détestent et des gazettes qui s'injurient... C'est l'intérêt du vainqueur lui-même: on n'est jamais mieux averti que par les gens qui ne vous aiment pas des bêtises qu'on va faire, ou qu'on a faites. En sorte que de tous ces hommes-ci, madame, il n'y en a pas un qui ne serve à quelque chose. Il y a parmi eux des esprits admirables; il y en a de médiocres aussi. Il y a des niais; il y a des fous. Tout cela s'agite, hurle, bataille, et de tous ces chocs--de ce pêle-mêle de raison et de folie, d'ambitions pures et de vilains appétits--naît une espèce d'équilibre... On ne vit pas très glorieusement, mais on vit. Dans ma jeunesse, j'avais un vieux maître qui me faisait lire Bernardin de Saint-Pierre et m'enseignait qu'il n'y a point d'insecte minuscule ou d'animal, si vilain qu'il soit, à qui la Providence n'ait assigné son utilité particulière et sa fin dans l'ordre général des choses. La même confiance m'anime dès que j'entre dans cette maison-ci. Et je pense aux dangers qui nous menaceraient, le jour où l'on ne s'y disputerait plus...»
*
* *
C'est vrai. Il ne faut pas craindre de voir les hommes se disputer. Au Salon d'automne (j'y repense!) un étrange spectacle s'offre aux visiteurs: on y regarde voisiner cette année, le plus simplement du monde, l'impressionnisme le plus éperdu et «monsieur Ingres». Si M. Ingres revenait au monde, il pourrait dire comme certain doge de Venise à la cour de Louis XIV: «Ce qui m'étonne le plus ici, c'est de m'y voir.» Cependant il constaterait, que même en si singulière compagnie, ses dessins font très bonne figure et qu'on est ravi de les y rencontrer. D'Ingres à Cézanne, que de chemin parcouru! On a marché («et dans quoi, mon Dieu!» comme disait Musset); on s'est injurié, on s'est battu. Aujourd'hui, on consent à causer; et, pour mieux causer, on se rapproche. Les amis de M. Ingres concèdent qu'on fit bien, il y a soixante ans, de les rudoyer un peu; les admirateurs de M. Cézanne avouent que M. Ingres avait du bon...
Tous ont raison. La concurrence n'est pas que l'âme du commerce et de la politique; elle est l'âme des arts aussi. Une mode chasse l'autre, et cela est excellent. Ce serait affreux, des modes éternelles.
Au théâtre, cet hiver, la mode est au suicide. M. Gandillot débattait le mois dernier par une noyade, au théâtre Antoine; au Gymnase, M. Bernstein a préféré que son héros se fît sauter la cervelle; M. Henry Bataille, au Vaudeville, a eu recours à la même bruyante solution; et l'on nous annonce d'autres drames prochains, que d'autres suicides termineront.
Le théâtre aimable--la pièce qui «finit bien»--commençait à nous ennuyer
un peu; nous nous sommes hâtés d'y substituer du théâtre horrifique, du
drame noir, un peu sanglant; et voilà les Parisiennes ravies. Pas pour
longtemps. Elles se plaindront bientôt d'avoir trop pleuré, trop frémi;
l'odeur de la poudre les dégoûtera. Alors reparaîtra Capus; et, de
nouveau, pendant un hiver ou deux, il sera formellement admis que la vie
est belle, et que «tout s'arrange»...
Sonia.
L'indépendance de l'âme fonde celle des États. Mme de Staël.
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La pleine liberté de la presse a tué l'art de savoir tout dire dans le temps où il n'est permis de rien dire du tout. Le grand air fait du mal aux fleurs de serre. Ernest Lavisse.
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Les événements sont des juges qui font payer très cher leurs sentences; la justice de l'histoire est la plus coûteuse de toutes les justices. Valbert.
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Il ne faut jamais trop parler du bonheur, on l'effarouche. M. DE COMISELLE.
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On pardonne beaucoup aux illusions qui consolent, quand on est aux prises avec les réalités qui ne consolent pas.
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Certaines âmes délicates redoutent les fêtes qui célèbrent les dates heureuses de notre passé, comme si elles nous dénonçaient au malheur qui nous oublie. G.-M. Valtour.
Le président, le roi et les invités se rendant au lieu de chasse; dans le domaine royal de Rio-Frio. |
A la chasse aux perdreaux dans la Casa del Carapo. Alphonse XIII: «C'est moi qui les ai tués!» |
Alphonse XIII et son porte-fusil.
Pendant les dernières journées du séjour de M. Loubet en Espagne, le programme a fait la part belle à l'élément sportif. C'est ainsi qu'il y eut consécutivement deux chasses, et ce ne fut pas trop au gré du souverain et de son hôte, étant donné leur goût personnel prononcé pour ce passe-temps favori de la plupart des chefs d'État. La première, une chasse à la grosse bête, eut lieu le mercredi 25, sous la direction du comte de San-Roman, grand veneur, dans le domaine royal de Rio-Frio, situé à trois heures de chemin de fer de, Madrid, et dont les tirés abondent en cerfs, daims et chevreuils. Les chasseurs, divisés en groupes de deux ou trois, étaient placés derrière des abris, de manière à pouvoir viser tranquillement les pièces de choix parmi le gibier que poussaient devant eux une centaine de rabatteurs. Le jeudi 26, le roi et le président, accompagné encore, de M. Paul Loubet, son fils aîné, employaient leur matinée à chasser le lapin et le perdreau dans la Casa del Campo, autre parc royal, mais voisin, celui-là, du palais de Madrid. Ajoutons que, la veille, à la suite de la chasse, Alphonse XIII, plein d'un entrain juvénile, avait improvisé une excursion au château de la Granja et à Ségovie, conduisant lui-même d'une main sûre l'automobile où il emportait son illustre visiteur.
M. Loubet et son fils, M. Paul Loubet, dans leur abri à la chasse de Rio-Frio. --Phot, M. de Baena. |
M. Loubet. Alphonse XIII. Le départ en automobile pour Ségovie--Phot. L. Bouet. |
M. Loubet. Le prince héritier Louis-Philippe S. M. la reine Amélie. Le duc d'Oporto. S. H. le roi Carlos.
Cliché Novaës.
LE VOYAGE DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE EN PORTUGAL.
--Devant le
photographe, à Cintra.
L'excursion à Cintra, le samedi 28 octobre, eut surtout le caractère d'une partie de campagne, et là, plus qu'ailleurs, l'étiquette protocolaire se départit de sa rigueur, laissant libre carrière à un aimable enjouement, dont les souverains portugais donnaient l'exemple. C'est ainsi qu'à l'issue du déjeuner au Palais Royal, la reine Amélie organisa une séance de photographie, invitant avec une bonne grâce charmante tous les convives à la suivre devant les objectifs préparés par les opérateurs de L'Illustration. Après le groupe général, elle voulut un groupe plus intime, à l'arrangement duquel elle se fit un plaisir de procéder elle-même. Le président Loubet était placé à sa gauche, le roi à sa droite; derrière eux se tenaient le prince royal et le duc d'Oporto, frère du roi. La pose, excellente, favorisa la réussite des clichés.
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE EN PORTUGAL.
La galère, tirée par cent rameurs en costume de galérien, conduisant au
Léon-Gambetta la famille royale et M. Loubet pour le déjeuner d'adieu
à bord du cuirassé français, le 29 octobre.
--Phot. L. Bouet.--Voir
l'article, page 304.
On nous a dit: «Pourquoi L'Illustration, qui consacre chaque année aux traditionnels Salons du printemps tout un numéro, affecte-t-elle d'ignorer le jeune Salon d'automne? Vos lecteurs de province et de l'étranger, exilés loin du Grand Palais, seraient heureux d'avoir au moins une idée de ces oeuvres de maîtres peu connus, que les journaux les plus sérieux (le Temps lui-même) leur ont si chaleureusement vantées.»
Nous rendant à ces raisons, nous consacrons ici deux pages à reproduire de notre mieux une douzaine de toiles marquantes du Salon d'automne. Il y manque malheureusement la couleur; mais on pourra du moins juger le dessin et la composition. Si quelques lecteurs s'étonnent de certains de nos choix, qu'ils veuillent bien lire les lignes imprimées sous chaque tableau: ce sont les appréciations des écrivains d'art les plus notables, et nous nous retranchons derrière leur autorité. Nous remarquerons seulement que, si la critique, autrefois, réservait tout son encens aux gloires consacrées et tous ses sarcasmes aux débutants et aux chercheurs, les choses ont vraiment bien changé aujourd'hui.
Dans le clan des jeunes, Guérin est un des premiers qui se soient frayé une oie neuve... Les transcriptions de la forme féminine qui constituent son envoi principal ont ceci de très particulier qu'elles sont à la fois familières, extrêmement réalistes, et pourtant sans vulgarité. Elles se relèvent d'une ingénuité de sentiment qui, dans une très forte mesure, les stylise... Thiébault-Sisson, le Temps. |
... Un des plus beaux peintres que ces dernières années nous aient révélés; ses harmonies sont une perpétuelle fête pour le regard. Arsene Alexandre, le Figaro. Ces paysages sont reposants, ces intérieurs silencieux et quiets, propices infiniment à l'étude, aux douces rêveries... J'envie l'homme opulent et raffiné qui pourra les contempler à loisir, de son fauteuil, en tournant les pages de quelque, livre très attachant. Gustave Babin, l'Écho de Paris. |
PAUL CÉZANNE.--Les Baigneurs.
Paul Cézanne donne une sensation d'harmonie, de gravité. La nature est chez Cézanne, solennelle et éternelle... Je ne puis m'empêcher de voir en ce singulier et si simple artiste, une des plus belles incarnations de l'art de peindre... J'ai, devant ces oeuvres si pures, la sensation de me trouver devant des aspects à jamais fixés... Je crois que cette peinture traversera les temps. Sa beauté est profonde et sereine... Gustave Geffroy, le Journal.
Cézanne: le public va-t-il comprendre enfin ce langage rude et haut qu'on ne parle guère à ses oreilles?... Il est temps que s'impose l'âpre grandeur de cette oeuvre inégale, mais toujours émouvante... Les Baigneurs michelangesques sous un ciel obscur d'été orageux... Louis Vauxcelles, Gil Blas.
HENRI ROUSSEAU.--Le lion, ayant faim, se jette sur
l'antilope.
Ancien douanier en retraite, M. Henri Rousseau, auquel les Salons des Indépendants firent fête autrefois pour sa naïveté miraculeuse et sa gaucherie non apprise, a été accueilli avec un pieux respect au Salon d'automne, où la toile reproduite ici occupe une place d'honneur.
C'est une miniature persane agrandie, transformée en un énorme décor, non dépourvu d'ailleurs de mérite... Thiébault-Sisson, le Temps.
M. Rousseau a la mentalité rigide des mosaistes byzantins, des tapissiers de Bayeux: il est dommage que sa technique ne soit pas égale à sa candeur. Sa fresque n'est pas du tout indifférente: je concède que l'antilope du premier plan s'adorne à tort d'un museau de brochet; mais le soleil rouge et l'oiseau apparu parmi les feuillages témoignent d'une rare ingéniosité décorative. Louis Vauxcelles, Gil Blas.
Il est tout un groupe qui continue le mouvement impressionniste avec talent, mais sans assez changer la forme générale et l'aspect particulier des choses déjà vus par des peintres tels que Monet et Sisley. Ainsi MM. Maufra,... Alcide Le Beau (qui, lui, voisine, cette fois, avec Van Gogh). Ils savent peindre et ils exposent de belles toiles: on ne peut que leur demander de découvrir la nature pour leur compte. Gustave Geffroy, le Journal. Il a élargi puissamment sa manière, rejette les détails superflus; sa vision du Bois de Boulogne, les lacs où voguent les cygnes noirs sont d'une couleur qui séduit infiniment. L'envol de M, Le Beau est un des plus marquants du Salon. Louis Vauxcelles, Gil Blas. |
M. Manguin: progrès énorme; indépendant sorti des pochades et qui marche résolument vers le grand tableau. Trop de relents de Cézanne encore, mais la griffe d'une puissante personnalité toutefois. De quelle lumière est baignée cette femme à demi nue qui sommeille sur un canapé d'osier! Gil Blas. Louis Vauxcelles, Gil Blas. |
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M. Matisse est l'un des plus robustement doués des peintres d'aujourd'hui. Il aurait pu obtenu de faciles bravos, il préfère s'enfoncer, errer en des recherches passionnées, demander au pointillisme plus de vibrations de luminosité, Mais le souci de la forme souffre. Louis Vauxcelles, Gil Blas. M. Henri Matisse, si bien doué, s'est égaré comme d'autres en excentricités coloriées, dont il reviendra de lui-même, sans aucun doute. Gustave Geffroy, le Journal. |
GEORGES ROUAULT.--Forains, Cabotins, Pitres.
Il est représenté ici par une série d'études de forains dont l'énergie d'accent et la robustesse de dessin sont extrêmes. Rouault a l'étoffe d'un maître et je serais tenté de voir là le prélude d'une période d'affranchissement que des créations originales et des travaux définitifs marqueront. Thiébault-Sisson, le Temps.
M. Rouault éclaire, mieux que l'an passé, sa lanterne de caricaturiste à la recherche des filles, forains, cabotins, pitres, etc. Gustave Geffroy, le Journal.
M. Rouault... âme de rêveur catholique et misogyne. Louis Vauxcelles, Gil Blas.
ANDRÉ DERAIN.--Le séchage des voiles.
M. Derain effarouchera... Je le crois plus affichiste que peintre. Le parti pris de son imagerie virulente, la juxtaposition facile des complémentaires sembleront à certains d'un art volontiers puéril. Reconnaissons cependant que ses bateaux décoreraient heureusement le mur d'une chambre d'enfant. Louis Vauxcelles, Gil Blas. |
LOUIS VALTAT.--Marine.
A noter encore:... Valtat et ses puissants bords de mer aux abruptes falaises. Thiébault-Sisson, le Temps. M. Louis Valtat montre une vraie puissance pour évoquer les rochers rouges ou violacés, selon les heures, et la mer bleue, claire ou assombrie. Gustave Geffroy, le Journal. |
JEAN PUY.--Flânerie sous les pins.
... M Puy, de qui un nu au bord de la mer évoque le large schématisme de Cézanne, est représenté par des scènes de plein air où les volumes des choses et les êtres sont robustement établis. Louis Vauxcelles, Gil Blas.
COMMENT ON PRÉPARE UNE RÉVOLUTION:
L'ÉDUCATION DU PEUPLE RUSSE PAR LES
ÉTUDIANTS
D'après un tableau de Bogdanof-Bielski.
Le manifeste signé, le 17/30 octobre, à Pêterhof, par le tsar, octroie à la Russie les libertés essentielles auxquelles elle aspirait depuis si longtemps. C'est dans l'histoire du peuple russe une date autrement décisive que celle du 19 août, où lui avait été donné l'oukase instituant la douma d'empire. L'acte libéral de l'empereur Nicolas II ne peut manquer d'ailleurs d'être revendiqué comme une victoire par cette partie de l'élite cultivée de la nation qui, après des années de patient travail, a réussi à provoquer, dans l'immense empire, l'agitation profonde qui a pris, en ces derniers jours, un caractère singulièrement inquiétant. C'est, en effet, la jeunesse studieuse de la Russie, ce sont ses maîtres et, avec eux, auprès d'eux, les écrivains, les artistes, tous les «intelligents», comme on dit là-bas, qui, lentement, ont préparé les événements auxquels nous assistons. Cette scène qu'a retracée, d'un pinceau ému, un artiste évidemment en sympathie avec les agitateurs, était de tous les jours. Dans la salle de quelque humble école villageoise, pas plus luxueuse que la chambre unique des isbas de sapin des paysans, autour d'un étudiant, prenant sur les heures de son travail personnel le temps d'accomplir ce ministère de catéchiste, venaient se grouper, pour une lecture à leur portée, sorte de prêche laïque, tous les humbles qui le voulaient, auxquels se mêlaient volontiers pour l'exemple deux ou trois amis politiques du conférencier, étudiants eux-mêmes, ou professeurs. Des enfants aux yeux ardents et naïfs coudoyaient là des femmes, recueillies comme au temple, et des vieillards au regard désabusé et las, désespérant de voir les temps qu'on leur promettait: auditoire ignorant et croyant, tout imprégné de mysticisme et prêt à accueillir avec enthousiasme les idées séduisantes qu'on lui jetait en pâture.
Les Karpathes (2.500 m.) vus d'une altitude de 4.900 mètres. | Villages et champs hongrois photographiés à 4.500 mètres de hauteur. |
PHOTOGRAPHIES PRISES EN HONGRIE, PAR LE COMTE ROZAN, LE 16 OCTOBRE 1905.
LE GRAND PRIX DE L'AÉRO-CLUB.--1.400 KILOMÈTRES EN BALLON EN 18 HEURES
Nous avons publié, dans le numéro du 21 octobre, une page représentant les quinze ballons que l'on gonflait, dans le jardin des Tuileries, pour participer ci la fête donnée au profit des victimes du tremblement de terre de la Calabre--et aussi au Grand Prix de l'Aéro-Club de France. Le Grand Prix a été gagné par M. Jacques-Faure, montant avec le comte Mozart le ballon la Kabylie, qui est allé atterrir à 1.100 kilomètres, près de Kirchdrauf, en Hongrie. Les hardis aéronautes n'avaient mis que dix-huit heures pour accomplir ce parcours, c'est-à-dire qu'ils l'avaient franchi à la moyenne de plus de 77 kilomètres à l'heure. Pour revenir de Kirchdrauf à Paris par la voie ferrée, en prenant les trains les plus rapides, ils ont mis 12 heures--beaucoup plus du double. C'est le pilote, même de la Kabylie, M. Jacques-Faure, qui a bien voulu raconter aux lecteurs de L'Illustration les détails et les péripéties de cette magnifique ascension.
Quatre heures de l'après-midi: difficilement maintenu à terre par les aérostiers du 1er régiment du génie, que le ministre de la Guerre a bien voulu mettre à notre disposition, notre ballon, la Kabylie, sous l'effort du vent qui souffle par rafales, s'incline d'une façon inquiétante sur les statues et les becs de gaz du bassin des Tuileries. Malgré un temps épouvantable et une pluie battante, la foule, très intéressée par ce spectacle inusité de quinze ballons s'élevant du coeur même de Paris, a peu à peu envahi le jardin: des barrières ont été brisées, la police est débordée, et le monde s'empresse de telle façon autour de ma nacelle qu'il m'est matériellement impossible, au dernier moment, tant la foule est dense, de faire les 20 mètres qui me séparent de mon manteau de voyage resté chez le concierge des Tuileries: tant pis, nous partirons sans lui.
«La Kabylie» partant des Tuileries,
le 15 octobre 1905.
Péniblement, la Kabylie est mise debout: nos braves aérostiers militaires, gênés par le publie, qui leur laisse à peine la liberté de leurs mouvements, manoeuvrent très difficilement. Au dernier moment, alors que tout semble prêt, une cordelette se brise; quelques secondes de plus, et nous partions avec l'appendice de notre ballon fermé: c'était notre aérostat éclatant à 300 mètres d'altitude, la chute inévitable, la mort certaine après quelques instants d'ascension. Mais mon vieil ami Santos-Dumont est là; il a vu le danger: sans hésiter il saute dans le cercle, grimpe comme un chat le long de la corde d'appendice et brise le «fil à casser» qui le maintient. Tout est prêt, nous allons partir: sur le bord de la nacelle, vingt personnes nous tendent les mains: au revoir! bonne chance! vive l'Aéro-Club! «Attention à la mer!» me crie au dernier moment mon ami Tollander de Balsch, qui garde un humide souvenir du bain forcé qu'il a pris, la semaine dernière, dans les polders du Zuiderzée.
C'est fini; nous sommes en l'air; le spectacle est inoubliable: la foule couvre les Tuileries, la place de la Concorde et une partie des Champs-Elysées; à perte de vue, c'est une mer de parapluies ouverts, serrés les uns contre les autres sous des rafales de brouillard et de pluie. Il est impossible de décrire cette sensation extraordinaire de l'aéronaute emporté par un vent violent; c'est le calme dans la tempête, immobilis in mobile: penché sur le bord de sa nacelle, sur le bord de ce balcon aérien qui marche à de fantastiques vitesses, il voit les villes, les forêts, les montagnes, défiler sous ses yeux émerveillés.
Le comte Rozan et M. Jacques-Faure.
En bas, c'est la tempête, le vent qui souffle avec un fracas abominable à travers les bois et les chemins; en haut, dans le frêle panier d'osier, le calme absolu, la sensation de sécurité parfaite.
Notre nacelle est équipée pour la course: de 7 ou 8 kilos plus légère que les nacelles ordinaires, elle est aussi beaucoup plus petite, en sorte que les sacs de lest la remplissent; elle est pleine plus qu'à moitié; nos genoux sont à la hauteur des bords du panier.
Dès le départ, nous nous assurons notre direction: à 300 mètres d'altitude, nous traversons en tourbillon la place Vendôme; nous laissons franchement le Sacré-Coeur au nord: nous filons donc vers l'est.
Je consulte mon compagnon de voyage; comme moi, le comte Rozan est décidé à gagner la course, ou du moins à faire l'impossible pour cela: il s'agit d'aller vite et longtemps: en haut, le vent est plus violent, nous allons monter. Tant pis si notre direction change, puisque la seule mer que nous puissions rencontrer sur notre route est la Baltique, et que nous sommes décidés, quoi qu'il arrive, à nous aventurer au-dessus d'elle.
A 2.700 mètres, nous trouvons notre équilibre entre deux couches de nuages; nous nous maintenons à cette altitude sous une tempête de glace et de neige; notre nacelle et notre ballon sont littéralement incrustés de givre et notre thermomètre s'abaisse parfois à 14 et 15 degrés centigrades au-dessous de zéro.
La ville de Kirchdrauf, prise à 4.200 mètres. (A l'horizon, les Karpathes: 2.500 m.) | Le village de Szepesvaralja, photographié durant la descente effectuée à 600 mètres à la minute. | Szepesvaralja, vu à l'arrivée à terre. |
ENTRE 10 HEURES ET 11 HEURES DU MATIN, A BORD DU BALLON «LA KABYLIE»
PILOTÉ PAR M. JACQUES-FAURE.
Itinéraire de l'aérostat la Kabylie de Paris à
Kirchdrauf.
Vers minuit, le vent redouble de violence, les nuages se déchirent au-dessus et au-dessous de nous; nous apercevons en même temps les lumières à terre et l'étoile polaire dans le ciel, ce qui nous permet, par une observation rapide, de constater que notre direction se maintient vers l'est; à partir de minuit, le ciel s'éclaire, la terre disparaît de nouveau sous une couche de nuages très épaisse, et nous naviguons baignés par un clair de lune splendide, tandis que l'ombre du ballon se profile sur les brumes, entourée d'un cercle brillant, bien connu des navigateurs aériens sous le nom d' «auréole des aéronautes»; de temps en temps la lune s'entoure des couleurs du spectre. De tels spectacles sont aussi fantastiques qu'inoubliables: pour y croire, il faut les avoir vus et toute description devient impossible devant de telles manifestations de la nature. C'est un conte d'Hoffmann vécu. De temps en temps, dans une éclaircie, la terre apparaît; nous reconnaissons Munich; Linz et Vienne reliées entre elles par un brillant ruban argenté; c'est le Danube, le plus beau fleuve d'Europe, dont nous observons de 3.000 mètres de hauteur le cours large et majestueux.
M. Jacques-Faure descendant par un
filin de la nacelle, accrochée dans
un arbre, près de Kirchdrauf.
A 5 heures le jour paraît, tandis que la lune s'abaisse à l'horizon; la lumière ne nous a donc pas manqué un seul instant, et c'est à peine si, durant cette seconde partie de la nuit, je me sers de temps en temps de ma lampe électrique.
A 6 heures, je prends contact avec le sol; là, le vent souffle à peine à 25 kilomètres à l'heure; une rapide conversation avec des paysans dont nous ne saisissons que le mot «Oestreich» (Autriche), et nous remontons à 4.000 mètres, où nous retrouvons la bonne brise de la nuit qui nous entraîne toujours vers l'est à 80 kilomètres à l'heure. Nous n'avons plus que 42 kilos de lest; j'en mets 12 dans un coin de la nacelle et jusqu'à 9 heures nous nous équilibrons entre 4.000 et 5.200 mètres avec les 32 autres kilos.
A 9 h. 1/2, les bouteilles, les provisions passent par-dessus le bord; à 10 h. 1/4, c'est le tour des sacs de voyage; depuis longtemps déjà nos objets de toilette, nos chaussures et nos vêtements de rechange avaient pris le même chemin: notre nacelle est absolument vide.
Le froid est abominable; nous sommes très fatigués par ce long séjour dans les hautes régions de l'atmosphère; Rozan est complètement vert, ce qui ne l'empêche pas de me proposer froidement de grimper dans notre cercle, et d'envoyer notre nacelle rejoindre nos provisions. Mais j'ai à peine la force de soulever mon dernier sac de lest, et à 10 h. 1/2 commence à 5.200 mètres une descente foudroyante et vertigineuse.
Eu moins de sept minutes nous sommes au sol, ayant pu, durant cette véritable chute, prendre les quelques clichés que nous sommes heureux de soumettre aujourd'hui aux lecteurs de L'Illustration.
A 20 mètres de terre, le ballon passe au-dessus d'un petit bois; j'ouvre mon ballon en deux: la corde de déchirure fonctionne parfaitement, et, comme un grand oiseau blessé, il s'abîme sur un arbre, presque sans choc, sans secousse, la nacelle d'un côté, l'étoffe de l'autre. Suivant l'usage, je quitte la nacelle le dernier, et Rozan me photographie tout tranquillement, tandis qu'à bout de forces, je descends péniblement de mon arbre, le long du seul bout de filin qui nous reste.
Nous sommes à Kirchdrauf (Hongrie), à 1.400 kilomètres de Paris, ayant effectué l'un des trois plus longs voyages aériens du monde entier.
Le Grand Prix de l'Aéro-Club de France est à nous.
Jacques-Faure.
Les bureaux du journal Novosti Dnia gardés par la police. | Les bureaux du journal Rouski Listok gardés par les cosaques. |
PENDANT LA GRÈVE DES TYPOGRAPHES A MOSCOU
Les typographes, les imprimeurs, tous les travailleurs qui concourent à la confection matérielle des journaux ont été des premiers à entrer dans les vues des meneurs de la révolution russe qui poussaient à la grève générale comme au sûr moyen d'obtenir les réformes politiques demandées. Quelques-uns ont bien cherché à résister à ce mouvement, ont voulu continuer le travail, sous la protection de la gendarmerie ou des cosaques. C'est ainsi que certaines imprimeries de Moscou, celles des Novosti Dnia et du Rouski Listok, par exemple, ont continué à fonctionner pendant quelques jours sous la protection de la force armée. Mais la plupart des grandes villes de l'empire, à commencer par Saint-Pétersbourg, sont actuellement sans journaux, sans nouvelles, séparées du reste du monde, isolées même l'une de l'autre.
Le général Dragomirof.
--Phot. Pirou, boul. Saint-Germain.
«Mikhaël Ivanovitch», comme on l'appelait familièrement, vient de s'éteindre à Konotop, près de Kiev, dans sa terre patrimoniale, où il était né, où reposent les siens.
Sa popularité en Russie était considérable. Sa renommée avait franchi toutes les frontières. Chez nous, dont il avait suivi les armées pendant toute la campagne d'Italie, et où il était revenu souvent, prenant part avec un intérêt passionné aux manoeuvres, se complaisant à vivre parmi nos soldats, il était fort connu et on l'aimait beaucoup.
Ses théories sur l'éducation du troupier, qui voulaient que l'officier eût avant tout pour objectif de former le moral du soldat, étaient d'abord trop conformes à nos idées humanitaires pour ne pas lui avoir conquis, en France, de chauds admirateurs. En fait, d'ailleurs, elles semblaient mieux conçues pour s'appliquer au soldat français, dégrossi, déluré, qu'au malheureux moujik illettré.
Aussi bien, ces théories séduisantes, Dragomirof eut peu l'occasion d'en vérifier sur les champs de bataille l'excellence. Cette occasion pourtant, la guerre de 1877 sembla devoir la lui fournir. A la tête de la 14e division, qu'il commandait, à Kichinef, depuis plusieurs années, il dirigea brillamment le passage du Danube, pour marcher ensuite vers Chipka. Mais une balle, qui le blessa au genou gauche, l'immobilisa pour la durée de la campagne.
Il demeura donc un théoricien, un éducateur, un professeur d'énergie militaire fort convaincant.
Au commencement de la guerre russo-japonaise, il avait tenu à aller dire adieu aux troupes du gouvernement de Kiev partant pour la Mandchourie. Et il avait saisi ce prétexte pour leur répéter en guise de suprême recommandation, leur paraphraser l'un de ses adages favoris: «Tire rarement, mais juste ; pique ferme avec la baïonnette. La balle s'égarera, la baïonnette ne s'égarera pas; la balle est folle, la baïonnette est une luronne.»
Hélas! contre les canons d'aujourd'hui, une «luronne» bien impuissante!
Le général O'Connor, qui vient de mourir à Paris.
Le général de division O'Connor, commandeur de la Légion d'honneur, qui vient de mourir à la maison de santé des frères Saint-Jean de Dieu, où il suivait un traitement, après une grave opération, était né à Paris en 1847. Sorti de Saint-Cyr en 1868, il appartenait à l'arme de la cavalerie. Capitaine en 1876, il passa par l'École supérieure de guerre et fut promu chef d'escadron en 1883, lieutenant-colonel en 1887, colonel en 1891, général de brigade en 1896 et divisionnaire en 1902. Il avait pris part aux expéditions de Tunisie et du Tonkin ; mais c'est surtout à la tête de la division d'Oran qu'il devait se signaler comme organisateur de la plupart des postes de notre frontière marocaine. Un désaccord avec le gouvernement sur les mesures à prendre dans le Sud-Oranais motiva son déplacement ; à la fin de 1903, il était appelé au commandement de la 8e division d'infanterie au Mans, mis bientôt en disponibilité, puis nommé membre du Comité technique de l'artillerie et de la commission mixte des travaux publics.
Le monument de Moltke, inauguré à Berlin
le 26 octobre.
Il n'est guère de ville allemande se respectant un peu qui n'ait sa statue de Moltke, voisinant avec celle de Bismarck. Berlin possédait seulement, sur la place Royale, l'effigie du chancelier de fer, face à la colonne de la Victoire. La place réservée, en pendant, au feld-maréchal demeurait vide, le sculpteur Joseph Uphues, chargé de la meubler, se consumant, depuis des années, en efforts, pour mettre au monde un chef-d'oeuvre.
Il ne paraît guère qu'il y ait réussi. Il a campé son Moltke debout, appuyé à une sorte de colonnade qui n'a pour excuse d'être dorique que l'ambition puérile du statuaire d'avoir voulu la a raccorder », comme disent les architectes, avec quelques vilaines bâtisses de Berlin, qui sont du même ordre. Ce siège bizarre est d'ailleurs ridicule de disproportion avec la figure. Mais il v a dans l'attitude que le professeur Uphues a donnée au vieux stratège, les mains croisées, le regard droit, une impression de tranquille confiance qui n'est pas sans caractère.
Le monument entier est en marbre. Ce serait, paraît-il, le plus gros bloc de marbre qu'on ait jamais taillé--au moins dans les temps modernes.--Mais cette statue a attiré encore l'attention sur elle d'une autre façon : c'est à l'occasion de son inauguration, le 26 octobre, que le kaiser a prononcé, verre en main, les paroles belliqueuses qu'on a fort commentées ces jours derniers.
La mode actuelle est incontestablement aux Japonais et, depuis les succès inattendus que ce petit peuple a remportés en Extrême-Orient, tout ce qui le concerne a le don d'exciter notre intérêt. C'est ainsi que, dans les milieux sportifs, on discutait tout récemment, non sans quelque vivacité, la question brûlante du jiu-jitsu. Le jiu-jitsu (prononcez djioudjitss) est-il un simple bluff, comme le prétendaient jadis la plupart des gens compétents? Est-ce, au contraire, le système idéal de défense individuelle, ainsi que le proclament les rares initiés de cet art nouveau? Le débat, qui était jusqu'à ce jour resté indécis, vient enfin d'être tranché. C'est du moins ce qui semble résulter du match disputé à Courbevoie, le jeudi 23 octobre, par le professeur Re-Nié, instructeur de jiu-jitsu à l'école de la rue de Ponthieu, et le maître Dubois, représentant des sports de défense français, qui avait lancé un défi à Re-Nié.
Le maître Dubois, qui fut jadis un sculpteur non sans talent, est à la fois un escrimeur dangereux, un boxeur redoutable, un faiseur de poids et d'haltères de premier ordre: c'est, en un mot, le véritable type de l'athlète. Sa taille est de lm,68; son poids de 75 kilos. Il est né en 1865.
Re-Nié, qui a juste trente-six ans, mesure lm,65 et pèse 63 kilos. Il a appris le jiu-jitsu à Londres sous les maîtres japonais Miyaké et Kanaya. Bien que robuste, il est notablement moins vigoureux que son adversaire.
Le combat, où tous les coups étaient permis, ne devait cesser que quand l'un des antagonistes se reconnaîtrait vaincu. Il a été très rapidement terminé par la victoire du jiu-jitsuan. En voici du reste le compte rendu sommaire:
Au commandement: Allez, les deux adversaires se portent rapidement l'un vers l'autre, s'arrêtent à environ 2 mètres et s'observent trois ou quatre secondes. Sur une feinte de Re-Nié, Dubois esquisse du droit un coup de pied bas que Re-Nié esquive. Dubois porte alors, du même côté, un coup de pied de flanc; mais au même instant, avec un à-propos extraordinaire, Re-Nié rentre d'un véritable bond de chat et saisit Dubois à bras-le-corps. Dubois essaye un tour de hanche: Re-Nié, que ce mouvement a placé à droite de son adversaire, appuie la main droite sur l'abdomen de ce dernier, en même temps qu'il lui comprime les muscles lombaires avec la main gauche et lui envoie un coup de genou sous la cuisse droite. Dubois bascule et tombe sur les omoplates comme une masse; il porte néanmoins à Re-Nié, resté dessus, une prise de gorge qui permet à ce dernier de lui cueillir le poignet droit. Re-Nié se renverse immédiatement sur le dos, à la gauche de Dubois, lui passe la jambe gauche en travers de la gorge, en lui maintenant avec ses deux mains le bras sur son abdomen, le coude en dessous, le bras passant entre ses deux jambes (1). Une vigoureuse pression, exercée sur le poignet de Dubois, menace de lui désarticuler au coude le bras qui se trouve en porte-à-faux. Dubois résiste pendant une seconde, puis demande grâce.
Le combat avait juste duré 26 secondes, dont 6 secondes seulement pour l'engagement proprement dit.
Les choses se sont passées exactement comme elles se seraient passées dans une rencontre non préméditée. Les deux adversaires étaient en tenue de ville, avec chaussures ordinaires; Georges Dubois avait même conservé son chapeau et ses gants. Le sol, recouvert de gravier, était seulement un peu moins dur que ne l'aurait été le macadam ou l'asphalte. Enfin le match a été disputé en plein air, sur la terrasse du nouveau bâtiment des établissements de carrosserie Védrine.
Le résultat a été d'une netteté parfaite. Le représentant de la méthode française n'a pas existé devant le représentant du jiu-jitsu.
*
* *
On pense bien qu'un événement de ce genre n'a pas été accueilli sans protestation de la part des adeptes de la boxe française ou anglaise. A les entendre, après coup, le maître Dubois n'était pas qualifié pour représenter les sports de défense, qu'il a précisément pour métier d'enseigner. Nous ne chercherons pas à discuter cette manière de voir; nous nous contenterons de dire que le jiu-jitsu, déjà officiellement pratiqué par les élèves de West-Point (le Saint-Cyr américain), les policemen de New-York et de Londres, etc., va, sur l'initiative de M. Lépine, être enseigné à partir de la semaine prochaine aux inspecteurs de la Sûreté et aux agents de la brigade des recherches. La défaite ultra-rapide d'un athlète très vigoureux et très exercé par un homme dont les moyens physiques étaient visiblement très inférieurs aux siens, et qui est en outre bien plus un instructeur qu'un combattant, a montré au préfet de police tout l'intérêt que présente le jiu-jitsu comme moyen de défense.
On a prononcé, à propos de la rencontre de Courbevoie et du jiu-jitsu en général, le mot de sport de voyou. Ce terme, déjà excessif dans la bouche de ceux qui condamnent la boxe anglaise comme trop brutale, prête quelque peu à rire quand il est prononcé par les adeptes convaincus de la boxe anglaise ou française. Croit-on qu'il soit beaucoup plus élégant d'écraser d'un coup de poing le nez de son adversaire que de le forcer par une adroite torsion de bras à demander merci? Rien n'est moins certain. Nous partagerions même volontiers l'opinion des deux officiers supérieurs d'artillerie qui viennent de publier chez Berger-Levrault une traduction du livre de M. Irving Hancock sur le jiu-jitsu et qui considèrent ce sport comme un art extrêmement intéressant, une «véritable escrime aussi captivante que celle de l'épée».
Est-ce à dire qu'il faille faire fi de notre vieille boxe française ou même de la lutte classique si chère à nos populations du Midi? En aucune façon. Si le jiu-jitsu paraît décidément supérieur au point de vue de la défense personnelle, la boxe et la lutte n'en restent pas moins des sports excellents pour le développement de l'adresse, de la force et du courage. Le jiu-jitsuan lui-même ne peut négliger complètement la boxe; il doit, en effet, connaître les moyens d'action du boxeur pour pouvoir, suivant l'expression consacrée, rentrer dans ce dernier dont la tactique est de le tenir à distance.
Ajoutons enfin que le jiu-jitsu n'est point, comme on le croit
généralement sur la foi de renseignements aussi erronés qu'incomplets,
une simple collection de trucs de combat: c'est en réalité une méthode
très originale et très complète de culture physique et d'entraînement
qui commence par l'éducation de l'enfant, pour continuer par celle de
l'adolescent et de l'homme fait, sans perdre de vue l'éducation physique
de la femme. Ce sont en grande partie les enseignements du jiu-jitsu qui
ont donné aux troupes japonaises leur merveilleuse endurance et leur
admirable sobriété, et l'on peut, sans être taxé d'exagération, dire que
la jiu-jitsu a eu sa part dans le triomphe, si inquiétant pour les
Européens, de la race jaune en Extrême-Orient.
L. Sauveroche.
Le match Re-Nié Georges Dubois. Coup de pied au corps
porté par Georges Dubois (vu de face) à Re-Nié (vu de dos).
Note 1: C'est la position des combattants à cet instant précis que représente la photographie ci-dessous.
G. Dubois. Re-Nié. Re-Nié la jambe passée sur la gorge de
Dubois, fait à son adversaire le coup d'étirement et de torsion du bras
qui a mis fin au combat après six secondes de lutte.
H. G. Wells, l'auteur de «la Vérité». CONCERNANT PYECRAFT, DONT NOUS PUBLIONS EN SUPPLÉMENT, DANS CE NUMÉRO, LA TRADUCTION FRANÇAISE.
C'est en 1895 que M. H. G. Wells a publié son premier ouvrage: la Machine à explorer le temps. Il avait alors vingt-neuf ans et, depuis cinq ans qu'il avait terminé ses études à l'Université de Londres, il professait les sciences en divers établissements d'enseignement secondaire de la capitale anglaise. Entre temps, il collaborait à des publications scientifiques et littéraires, à des revues de tous genres et même à des quotidiens. Encouragé par le succès de son premier roman, il publia coup sur coup, la même année, un recueil de nouvelles qu'on retrouve en partie dans le volume intitulé en français les Pirates de la mer et la Merveilleuse Visite; l'année suivante: les Roues de la Fortune et l'Île du docteur Moreau; en 1897, un recueil d'articles, un recueil de nouvelles et l'Homme invisible; en 1898, la Guerre des mondes; en 1899, Quand le dormeur s'éveillera, Une Histoire des temps à venir et les Récits de l'âge de pierre; en 1900, l'Amour et M. Lewisham; en 1901, Anticipations et les Premiers Hommes dans la Lune; en 1902, la Dame de la mer et la Découverte de l'avenir; en 1903, l'Humanité en formation et Douze Histoires et un Rêve; en 1904, Place aux géants; en 1905, Une Utopie moderne; il a achevé plusieurs romans, inédits encore, Kips, l'histoire d'un enfant; et un autre, sans titre jusqu'ici et plus fantastique, paraît-il, qu'aucun des précédents.
H. G. Wells.
On a dit du fécond écrivain qu'il était le «Jules Verne anglais», mais Jules Verne lui-même, qui avait une grande admiration pour son jeune confrère, a fort bien marqué les différences qui les séparent et M. Ch.-V. Langlois, de la Sorbonne, écrivait dans la Revue de Paris: «Tout le monde a lu les livres de H. G. Wells, le nouveau Jules Verne anglais, dit-on, mais un Jules Verne mieux informé, d'une fantaisie plus puissante, et philosophe.» Et ce qui a assuré le grand succès de Wells, en Angleterre et en Amérique comme sur le continent, c'est que tout le monde peut le lire et que tout le monde le lit de plus en plus. Le savant professeur qui discute les prestigieuses Anticipations de Wells prend un plaisir extrême à ses plus fantastiques récits; l'adolescent le suit, l'imagination éblouie, dans les temps à venir et dans l'âge de pierre, dans la lune ou à travers de plus lointains espaces; les lectrices moins vagabondes sont émues par les amours de M. Lewisham ou les tribulations de la Merveilleuse Visite, et les gens graves, les sociologues, les hommes de science, ou de toutes les sciences, s'émerveillent de ses audacieuses hypothèses, de ses prédictions déconcertantes qui influencent puissamment le mouvement des idées universelles. Et cet écrivain, ce penseur prodigieux a d'exquis moments de gaieté souriante, pendant lesquels il révèle la Vérité concernant Pyecraft ou narre tel autre conte facétieux ou burlesque.
Alphonse Allais est mort subitement, samedi dernier, à l'âge de cinquante-deux ans. Fils d'un pharmacien d'Honfleur, il était venu tout jeune à Paris pour étudier les sciences; mais, comme il arrive assez fréquemment, sa réelle vocation n'avait pas tardé à l'entraîner dans une voie bien différente, où il devait, d'ailleurs, trouver le succès et conquérir la réputation.
Alphonse Allais.
Après d'heureux débuts au Tintamarre et au Chat-Noir, la publication de monologues fort goûtés, même au-delà de Montmartre, berceau de sa notoriété, il collabora au Gil Blas, devint rédacteur attitré du Journal, puis rédacteur en chef du Sourire. Il aborda en outre le théâtre, en collaboration avec Alfred Capus et y réussit. C'est surtout la Vie drôle, cette série de chroniques, d'une fantaisie si particulière, d'une forme si originale, qui lui avait valu la faveur durable du public; la clientèle de lecteurs fidèles qu'il s'était faite se grossissait de nouveaux contingents quand il réunissait ces feuillets épars en des volumes dont les seuls titres, répétés comme des formules typiques, assuraient la vogue: A se tordre, On n'est pas des boeufs, le Parapluie de l'escouade, etc.
La verve par où Alphonse Allais s'était classé au premier rang des «auteurs gais» n'avait rien de banal ni de grossier; sa «blague» de pince-sans-rire était d'un observateur sagace, d'un fin satiriste, d'un humoriste du bon coin. Estimé du monde des lettres, il excella et sut rester égal à lui-même dans un des genres les plus difficiles à soutenir.
Romans.
On nous a conté souvent les exploits des «fils à papa». Ce sont des «fils à maman» que M. René Boylesve, l'auteur de l'Enfant à la balustrade, met en scène dans son nouveau et délicieux roman: le Bel Avenir (Calmann-Lévy, 3 fr. 50). Les «fils à maman» de l'ingénieux écrivain ne sont pas de bien grands caractères. Mais leurs mères: Mme Dieulefait d'Oudart, Mme Chef-Boutonne et Mme Lapoiroux, quelles héroïnes! Quels efforts pour assurer à leurs fils le «bel avenir» de tous les rêves maternels! Quel ressort, quels rebondissements après les échecs! Et surtout quelles habiletés raffinées--chez les deux premières--pour sauver la face dans les passes critiques! La fierté spéciale, l'amour-propre indomptable des mères de fils unique ont été finement observés par M. René Boylesve. Son livre est ironique sans malveillance. Celui qui le lit se surprend à sourire aux bons passages: et il y a de bons passages à tous les chapitres.
--M. Marcel Batilliat est de ceux qui poursuivent un dessein quand ils l'ont formé. Matériellement, il avait entrepris d'écrire une série de trois romans sous le titre général: le Règne de la Beauté. Après la Beauté et Versailles-aux-Fantômes, il nous donne aujourd'hui la Joie (Mercure ne France. 3 fr. 50). Il annonce maintenant le Règne de l'Action et le Règne de la Sagesse. C'est un beau programme d'écrivain. Faut-il tenter de résumer en quelques mots le sujet de la Joie? Ce serait aller contre le désir d'un auteur qui s'exprime ainsi dans un curieux avant-propos: «Les jeunes femmes qui figurent, avec de rares comparses volontairement effacés, les seuls personnages de la Beauté, de Versailles-aux-Fantômes et de la Joie, ne tiennent leur raison d'être ni de leurs aventures, ni de leurs crises sentimentales. Le milieu social où elles évoluent demeure strictement assez précis pour qu'elles semblent vivre de notre vie et de notre temps; leurs actions, dégagées de toute intrigue romanesque, se résument aux phases essentielles et nécessaires de leur existence. Geneviève de Ceyneste, Cillette Tynanges, Marie Nuaillère et leurs quelques amies ignorent des contingences tout le relatif et le momentané: elles ne sont étudiées que dans leurs rapports avec le cadre de nature qui les entoure et les influence, et selon l'instinct éternel qui les émeut et les dirige... Les romans du Règne de la Beauté, comme ceux du Règne de l'Action et du Règne de la Sagesse qui paraîtront ensuite, ne prétendent ni analyser ni décrire; mais concréter et résumer le plus d'humanité possible dans les attitudes naturelles de quelques jeunes femmes symboliques,--semblables pourtant, par leur mentalité et leur évolution, à beaucoup de jeunes femmes de cette époque. Ces livres sont donc l'essai et l'expression première d'un art qui veut s'efforcer avant tout vers une interprétation harmonieuse et décorative de la nature, de la pensée moderne et de la vie.» C'est un peu obscur, mais il n'y a qu'en citant un écrivain que l'on soit sûr de ne pas le trahir.
Questions d'actualité. Après M. Gabriel Veyre, qui publiait récemment: Au Maroc: dans l'intimité du sultan (Librairie Universelle, 3 fr. 50), voici qu'un autre collaborateur de L'Illustration, M. Jean du Taillis, qui accompagna l'hiver dernier à Fez la mission Saint-René-Taillandier, publie à son tour un volume très abondamment et luxueusement illustré sur le Maroc, pittoresque (Flammarion, 10 fr.). Dans une lettre-préface, M. Marcel Saint-Germain, sénateur d'Oran, constate que ce livre est fait «d'actualité, d'observations précises et judicieuses, de choses vécues». C'est le plus bel éloge qu'on puisse adresser, en peu de mots, à l'auteur d'un ouvrage de ce genre.
--Comme les livres sur le Maroc, les volumes sur les États-Unis se multiplient. Viennent de paraître coup sur coup: l'Empire du travail (la vie aux États-Unis), par Anadoli (Plon-Nourrit, 3 fr. 50), et le Vol de l'aigle (de Monroe à Roosevelt), par Joseph Ribet (Flammarion, 3 Fr. 50). Tous deux étudient, l'immense développement économique et politique de la grande république nord-américaine au dix-neuvième siècle. Et tous deux se préoccupent de voir déborder sur notre vieux continent cette force toujours croissante.
Nous publierons prochainement la Marche nuptiale, l'émouvante pièce de M. Henry Bataille que le Vaudeville vient de représenter et qui excite vivement l'intérêt du public. C est un de ces problèmes passionnels auxquels se plaît le talent hardi et profondément original de l'auteur. Mme Bertille Bady, MM. Dubosc et Janvier interprètent avec un rare talent les rôles principaux de la pièce.
Signalons à l'Odéon une très bonne reprise de la Souris, de Pailleron: Mlle Lély y remporte un grand succès dans le rôle créé jadis par Mlle Reichenberg.
Le théâtre Molière passe volontiers d'un extrême à l'autre; le programme de son nouveau spectacle comprend un assassinat en un acte, les Parias, de MM. R. Vancouver et Ch. Duflo, et cette pièce sans prétention littéraire est immédiatement suivie d'une légère et aimable comédie de MM. A. Germain et R. Trébor, Fred, parfaitement interprétée par Mlle Marguerite Caron et MM. A. Dubosc, H. Lamothe et Pouctal.
Après l'Anglais qui annonce un procédé industriel secret pour extraire l'or de la mer, voici un Belge qui nous dévoile pour s'enrichir à la même source un procédé tout à fait familial. Il suffit de plonger dans la mer ou dans les marais salants des éponges mordancées avec des sels d'étain suivant les méthodes pratiquées en teinturerie. Quand une tonne d'eau, soit 1.000 litres, aura passé sur l'éponge, de 32 à 64 milligrammes d'or valant de 11 à 22 centimes s'y seront déposés sous forme de pourpre de Cassius qu'un bain chimique très simple transforme en cyanure d'or. Et l'éponge peut resservir! On peut, d'ailleurs, lui substituer de vieilles robes de soie, des chaussettes de laine et n'importe quel produit mordancé comme il convient. Malheureusement, ce petit jeu est interdit aux enfants qui pataugent sur les plages, car le procédé est breveté. La pêche la plus fructueuse qu'on puisse en attendre nous paraît être celle des actionnaires.
La petite ville de Brignoles (Var) vient de fêter le centenaire d'un de ses habitants les plus universellement considérés, M. Auguste Bourgogne, né le 13 octobre 1805.
M. A. Bourgogne, né le 13
octobre 1805, entouré de
sa famille.
Président du tribunal de commerce de Brignoles pendant trente ans, doyen des fabricants tanneurs de France, M. Bourgogne s'est retiré des affaires il y a plus de cinquante ans. Il est le cadet d'une famille de quatorze enfants qui dépassèrent tous la quatre-vingtième année; sa soeur est morte à quatre-vingt-dix-sept ans.
Notre gravure le représente dans son jardin, entouré de son fils, de sa fille et de ses deux arrière-petits-enfants; elle atteste la verdeur de ce vieillard encore assez alerte pour avoir pu, le jour de son centenaire, se rendre à pied à l'église, puis à la salle de banquet et, de là, rentrer chez lui, ce qui représente un peu plus de deux kilomètres.
Depuis l'année 1621, où mourut dans cette ville une femme âgée de cent trente-quatre ans, on n'avait pas vu de centenaire à Brignoles.
L'importation en France de vélocipèdes, de motocycles et de pièces détachées, a été de près de 6 millions en 1904, au lieu de 5.670.000 francs en 1903, et celle des automobiles, venant pour le plus grand nombre du Wurtemberg, est passée de 1.267.000 à 3.836.000 francs.
Mais notre exportation a subi un accroissement beaucoup plus considérable, passant de 64.405.000 francs en 1903 à 85 millions 250.000 francs en 1904.
L'Angleterre, à elle seule, nous a acheté pour près de 40 millions d'automobiles.
Ainsi, en cinq ans, l'industrie automobile française a augmenté de 62 millions ses exportations.
L'exportation des vélocipèdes, motocycles et pièces détachées, est maintenant de plus de 6 millions et demi.
En Angleterre.--Le lord-chief-justice et le lord-chancellor se rendant à
la Chambre des lords après la cérémonie religieuse annuelle de l'abbaye
de Westminster.
La rentrée des cours et tribunaux s'est effectuée en Angleterre, le 24 octobre, avec le cérémonial accoutumé. Ce cérémonial comporte d'abord un service religieux: à Londres, où la présence des plus éminents représentants du corps judiciaire en rehausse l'apparat--de même qu'à Paris, naguère, antérieurement à 1901, date de l'abolition de cet antique usage, le personnel du Palais, avant la reprise de ses travaux, allait entendre la messe du Saint-Esprit ou «messe rouge», célébrée à la Sainte-Chapelle--les magistrats anglais vont assister aux prières propitiatoires dites à l'abbaye de Westminster. Ensuite, ils se rendent processionnellement à l'audience solennelle d'ouverture tenue à la Chambre des lords, laquelle, on le sait, outre son pouvoir législatif, possède de hautes attributions judiciaires.
La singularité pittoresque de ce défilé mérite d'être remarquée. On y voit, en effet, en pleine civilisation moderne, se dérouler sur la place publique, comme jadis, un cortège d'hommes vêtus de longues robes plus ou moins fourrées, coiffés de vastes perruques blanches semblables à des passe-montagnes, en tête duquel marchent gravement, à pas comptés, les deux dignitaires suprêmes de l'ordre, le «lord-chief-justice» et le «lord-chancellor», précédés d'huissiers et de massiers, suivis de porte-queue. Tandis que, chez nous, aujourd'hui, les gens de robe ne se résignent plus guère à s'exhiber dehors à pied, sous leur harnais professionnel, qu'aux grands enterrements officiels où les astreint le décret de messidor, chez nos voisins d'outre-Manche, ils ne craignent pas d'affronter la rue dans un appareil dont l'archaïsme plus complet jure davantage encore avec l'état actuel des moeurs. A Paris, un tel anachronisme ne manquerait pas de provoquer les sourires narquois, voire les quolibets irrévérencieux des badauds; à Londres, le prestige de la magistrature n'en est nullement compromis aux yeux des spectateurs qui, sans la moindre manifestation malséante, gardent une attitude flegmatiquement respectueuse.
Ainsi qu'on l'a déjà maintes fois observé, notamment à propos de la procession annuelle du «lord-maire», ce sont là des traits bien caractéristiques de l'esprit britannique: esprit, d'une part, très positif et très progressiste; d'autre part, obstinément conservateur de certaines traditions séculaires et de certaines coutumes surannées. Ces tendances contradictoires donnent lieu à de curieux contrastes; mais, après tout, peut-être l'apparente antinomie n'est-elle que la forme originale d'une puissante logique en vertu de quoi, pour ce peuple, pratique par excellence, le culte de la force du passé est une des plus solides garanties de la force du présent.
Divers procédés sont employés pour soustraire les bois de construction aux influences atmosphériques; en général, on injecte la masse ligneuse d'une substance aseptique formant avec les éléments du bois des combinaisons stables. C'est ainsi que les traverses de chemins de fer sont injectées de créosote, de chlorure de zinc ou de sulfate de cuivre.
Un chimiste allemand a imaginé de plonger le bois dans une solution de sucre de betterave. Le sirop s'infiltre dans les pores du bois et y forme une combinaison spéciale, car, après dessiccation, on ne retrouve aucun cristal de sucre. Le bois ainsi traité présente, affirme-t-on, une grande cohésion moléculaire et acquiert une grande force de résistance aux injures du temps.
Un immense groupe de taches vient d'être visible sur la surface du soleil. Il apparaissait le 14 octobre sur le bord oriental, passait au méridien central le 20 et disparaissait sur le limbe occidental le 26. Les photographies que nous donnons montrent, par le déplacement de cette tache, que le soleil tourne, comme on sait, sur lui-même, en vingt-cinq jours environ. Ces photographies sont orientées comme on voit les images dans une lunette astronomique, c'est-à-dire le sud en haut et l'est à droite.
Une autre magnifique tache est apparue le 21 octobre. Sa profondeur s'est accusée nettement, par le fait qu'elle a creusé sensiblement le limbe solaire. Cette tache sera visible sur le disque solaire jusqu'au 2 novembre prochain. Elle est visible à l'oeil nu comme un point noir.
Le grand groupe de taches
solaires: 20 octobre 1905
à 1 h. 48 m. soir.
Le soleil est, en ce moment, dans une période d'activité assez intense. On sait qu'il est des époques où l'on ne voit presque pas de taches à sa surface, d'autres, au contraire, où elles sont nombreuses. La période est de onze ans environ et le maximum arrive quatre ans et demi après le minimum. Le dernier maximum des taches solaires est arrivé en août 1893 et le dernier minimum en août 1901. Nous devons donc nous attendre à voir de très grandes taches cette année et l'année prochaine. Pour les observer, la plus petite lunette peut être employée, à la condition d'interposer entre l'oculaire et l'oeil un verre noir assez foncé.
Un très intéressant problème est à l'étude en ce moment. C'est la relation possible de l'état du soleil avec les différents phénomènes qui se passent au sein de l'atmosphère terrestre. Des données fort utiles pourront ainsi être obtenues et être d'une grande portée pratique pour l'avenir.
16 octobre 1905: 11 h. 37 m. du matin. | 20 octobre 1905: 11 h. 44 m. du matin. | 22 octobre 1905: 8 h. 53 m. du matin. |
Au concours organisé par la Société d'agriculture de la Haute-Vienne et tenu récemment à Limoges, de fort intéressantes constatations ont été faites.
Les boeufs étaient menés par leurs conducteurs habituels, mais ils étaient si bien dressés que les conducteurs se bornaient à faire le simulacre de se servir d'un fouet ou d'un aiguillon, mais sans frapper ni piquer les animaux.
La plus forte paire de boeufs, âgés de quatre ans et demi, pesant 1.380 kilos, se montra capable de fournir, en travail normal, un effort moyen de 317 kilogrammes à une vitesse moyenne de 60 centimètres par seconde, soit une puissance mécanique utilisable de plus de 190 kilos par seconde, ou un peu plus de 2 chevaux-vapeur et demi.
Ces chiffres prouvent que le boeuf en général et les boeufs limousins en particulier sont d'excellents animaux de travail.
Les résultats tiennent d'ailleurs en grande partie à la manière de conduire les boeufs. Avec la même paire d'animaux, le rendement varie beaucoup et, suivant l'adresse ou l'inexpérience du conducteur, il peut être supérieur ou inférieur, même avec une plus grande fatigue des animaux.
La fête vénitienne et le feu d'artifice en l'honneur du
président de la République, dans la baie de Cascaès, près Lisbonne, le
28 octobre.--Dessin d'après nature de Georges Scott.
Ainsi que tous les bulletins quotidiens du séjour de M. Loubet en Portugal se sont accordés à le constater, la réception faite au président de la République française a été remarquablement cordiale et brillante. Si, d'une part, la population, très démonstrative, n'a pas ménagé ses chaleureuses ovations, d'autre part, les souverains n'ont rien négligé pour rehausser l'éclat des fêtes données en l'honneur de leur hôte. Celui-ci a, d'ailleurs, exprimé à plusieurs reprises son impression personnelle en des termes significatifs, notamment le dernier jour, lorsque, à l'occasion de sa visite à l'hôtel de ville de Lisbonne, répondant au discours du président de la municipalité, il a dit: «Je vis ici dans un enchantement perpétuel, De mon arrivée jusqu'à mon départ, j'ai résidé dans un palais des Mille et une Nuits.»
La mise en scène déployée fut, en effet, d'une magnificence merveilleuse. On peut citer, comme exemple, les sept voitures de grand gala de la cour, sorties pour la circonstance du musée de Belem, superbes modèles de carrosserie et d'art décoratif des dix-septième et dix-huitième siècles. Le plus beau carrosse, attelé de huit chevaux, où les deux chefs d'État prirent place--les personnages de la suite occupant les autres--a été construit sous le règne du fastueux Jean V: surchargé d'ornements et d'ors, ses panneaux sont décorés de sujets genre Watteau, exécutés par le peintre français Quillard; l'intérieur est tendu de soie cramoisie.
A signaler encore la surprise finale d'une curieuse reconstitution: trois vénérables reliques du dix-septième siècle, trois galères royales, à la proue dorée en forme de chimère, à la vaste cabine d'arrière, tirées exceptionnellement de l'arsenal et équipées de leurs rameurs, au nombre de cent, quatre-vingts et quarante, revêtus du costume des anciens galériens, vareuse rouge et bonnet rouge liséré de jaune aux armes portugaises, maniant en cadence des avirons à manche rouge, à palette blanche semée de dauphins bleus. C'est une de ces embarcations historiques qui, le dimanche 29 octobre, transporta le roi, la reine et M. Loubet à bord du cuirassé Léon-Gambetta, où, avant l'appareillage, devait avoir lieu le déjeuner offert par le président.
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Le monument d'Orner Sarraut
à Carcassonne.
Dimanche dernier, a eu lieu, en présence de MM. Gauthier, ministre des Travaux publics, et Dujardin-Beaumetz, sous-secrétaire d'Etat aux Beaux-Arts, l'inauguration du monument commémoratif élevé par ses concitoyens à Orner Sarraut, ancien maire de Carcassonne, mort en 1887, à l'âge de quarante-trois ans, pendant l'exercice de ses fonctions municipales. Ce monument, érigé au Jardin des Plantes, est l'oeuvre du sculpteur Ducuing; en bronze et granit, il se compose d'une stèle supportant un buste vers lequel un enfant des écoles, que soutient une femme symbolisant la ville de Carcassonne, tend une palme en signe d'hommage et de gratitude; le soubassement repose dans la vasque d'une fontaine.
Les fils du défunt: MM. Albert et Maurice Sarraut, l'un député de Narbonne, l'autre directeur des services parisiens de la Dépêche de Toulouse, assistaient à la cérémonie, où plusieurs orateurs ont rappelé les vertus civiques de leur père et ses éminentes qualités d'administrateur.
(Tous les articles compris sous cette rubrique sent entièrement gratuits.)
LA JUMELLE «TOM POUCE»
M. Balbreck, l'opticien bien connu, vient de lancer dans le commerce la jumelle «Tom Pouce», dont le dernier modèle est muni de tous les perfectionnements que la science moderne lui a permis d'y apporter. Nous n'avons pas à rappeler ici les remarquables qualités de cet ingénieur, dont les appareils de précision sont particulièrement appréciés dans le monde scientifique. Il nous suffira de rappeler que nous devons à cet habile et savant constructeur le télémètre, la boussole directrice de reconnaissance militaire, la boussole nivelante, le méridien portatif, l'orographe Schrader et tant d'autres instruments qui rendent à l'armée et à la marine d'inestimables services.
Cette précision mathématique qui lui est familière, M. Balbreck a pu l'appliquer, et cela sans augmentation de prix, aux jumelles de théâtre ou de campagne fabriquées habituellement avec des tubes étirés ou du laiton repoussé.
Une visite tout particulièrement instructive et intéressante aux ateliers de ce constructeur, rue de Vaugirard, nous a permis de suivre de très près le nouveau procédé de fabrication et de nous convaincre de sa grande supériorité. Comme nous le savons tous, une lorgnette se compose de deux verres, l'oculaire par lequel on regarde et l'objectif tourné vers l'objet regardé. Pour que l'image soit nette, il faut que le centre des deux lentilles concorde mathématiquement, sinon le rayon visuel dévie et l'image est brouillée.
Cette exactitude mathématique existe toujours dans les lorgnettes et jumelles neuves, mais elle se perd rapidement à l'usage.
Cet inconvénient est dû au mode de construction. La partie extérieure, en effet, l'enveloppe, se fait en cuivre ou en fer-blanc repoussé. C'est ainsi qu'on lui donne sa forme bombée. Quant aux pièces droites, elles sont en métal étiré et, si adroit que puisse être l'ouvrier qui les confectionne, la coulisse qui sert à éloigner ou à rapprocher l'oculaire de l'objectif n'est pas toujours d'une forme cylindrique parfaite. On remédie à cet inconvénient en feutrant cette coulisse. Cela va bien dans les premiers temps, mais peu à peu le feutrage s'use et la concordance des centres n'existe plus.
La jumelle «Tom Pouce» ouverte. (Grandeur nature.) AA,
oculaires; BB. objectifs; C, traits numérotés indiquant l'écartement des
oculaires; D, bielle et mécanisme de mise au point.
De là le brouillard et le halo multicolore que l'on constate souvent dans les jumelles de théâtre.
L'unique instrument de travail employé dans les ateliers de M. Balbreck est le tour: il permet, seul, d'obtenir des tubes absolument ronds et droits, susceptibles de coulisser l'un dans l'autre sans jeu appréciable, et cela pendant une durée de service indéfinie. Il est d'ailleurs extrêmement curieux de voir des barres de laiton, après perforage et filetage à l'aide de tours-revolvers perfectionnés, se transformer en un rien de temps en élégantes montures de lorgnette qu'il suffit de voir pour les désirer.
Puisque nous en sommes à la partie mécanique, donnons une mention toute spéciale au mécanisme qui commande la mise au point: nous n'avons plus affaire cette fois au système ordinaire à vis, mais bien à un système de bielle double des plus originaux. Cette bielle, que l'on peut très bien voir sur notre gravure, commande les tubes porte-objectifs toutcomme une bielle ordinaire commande un piston de moteur; il suffit de tourner un bouton dont la manoeuvre est plus commode et plus rapide que celle des vis ordinaires.
La jumelle est munie d'un dispositif d'écartement variable pour oculaires. L'écartement des yeux varie, en effet, suivant les personnes, entre 60 et 70 millimètres et il en résulte une gêne très sensible lorsqu'on regarde dans une lorgnette ordinaire ne concordant pas avec les yeux du spectateur. On voit très souvent deux images séparées que l'on fusionne avec peine; cet inconvénient est évité dans la jumelle «Tom Pouce», il suffit de retenir une fois pour toutes l'écartement qui convient et qui se trouve indiqué par des traits numérotés visibles sur notre gravure.
La partie optique a été l'objet de soins spéciaux: il s'agissait d'obtenir un grossissement considérable sous une longueur et un volume minuscules. Seul l'emploi de douze verres, trois par oculaire et trois par objectif, permettait d'obtenir ces résultats; tout système optique achromatique, c'est-à-dire ne donnant pas d'images colorées, et anastigmate, c'est-à-dire donnant des images nettes, réclame, en effet, l'association de trois verres parfaitement taillés et centrés.
Cet ensemble de perfectionnements fait de la jumelle «Tom Pouce», un instrument puissant et commode sous un volume très faible. L'élégance en est d'ailleurs remarquable.
La jumelle «Tom Pouce» se trouve aux prix de 30 et 45 francs, suivant qualités, chez M. Dwelleroy, l'éventailliste bien connu, 35, boulevard des Capucines, et 17, passage des Panoramas, à Paris. Joindre 0 fr. 75 pour le port.
UN ENDUIT CONTRE LA ROUILLE
Un produit non salissant et susceptible de protéger les métaux contre la rouille serait assurément bien accueilli du public. A vrai dire, nous avons déjà pour ce but différents produits, en particulier de nombreux vernis à métaux, sans parler d'une simple couche de graisse quelconque, mais tous ces corps sont plus ou moins salissants et peu agréables à manier. Les vernis, d'autre part, dénaturent la surface ou la teinte du métal et, dans tous les cas, sont délicats à appliquer.
Le produit antirouille que nous a indiqué M. Bourdais ne présenterait aucun de ces défauts; il sèche vite, sans former d'épaisseur appréciable et sans altérer la couleur des métaux. On pourrait, d'autre part, manier longtemps les objets traités avec ce produit sans que la couche protectrice disparaisse.
D'après les indications qu'a bien voulu nous fournir l'inventeur, la base de cet antirouille serait le tannin associé à la térébène. Il existe toutefois deux sortes de produits, l'un destiné au fer et à l'acier, l'autre à tous autres métaux oxydables, le cuivre et le laiton, ainsi que les métaux d'orfèvrerie. On trouve ces deux antirouilles au prix de 0 fr. 75 le flacon (pour fer et acier) et 1 fr. 25 (pour tous autres métaux), port non compris, chez M. Marcel Bourdais, 4, rue des Filles-du-Calvaire, Paris.
Note du transcripteur: Les suppléments mentionnés en titre
ne nous ont
pas été fournis.