Title: L'Illustration, No. 3740, 7 Novembre 1914
Author: Various
Release date: May 5, 2019 [eBook #59442]
Language: French
Credits: Produced by Juliet Sutherland, Hans Pieterse and the Online
Distributed Proofreading Team at http://www.pgdp.net
Prix du Numéro: Un Franc. | SAMEDI 7 NOVEMBRE 1914 | 72e Année.—No 3740. |
UNE JOURNÉE HISTORIQUE DE L’AMITIÉ FRANCO-BELGE
Le roi Albert et le président de la République française, suivis de M. Millerand, du général Joffre et de M. de Broqueville, pénètrent dans l’Hôtel de Ville de Furnes, à quelques kilomètres du front de combat, le 1er novembre.
Voir l’article, page 339.
Combien est grande la détresse du soldat qui n’a sur sa tombe de bataille hâtivement creusée et parée qu’une croix de bois où déjà s’efface une inscription devenue illisible! Et pourtant cette détresse est avantageuse encore et privilégiée si vous la comparez à celle des morts perdus, disparus à jamais, engloutis dans les profondeurs de l’immense inconnu, comme le marin dans le sein des flots. Devant le petit tumulus des premiers on peut au moins se dire: «Un homme est là qui est tombé pour son pays. Je ne sais pas quel il est... je sais qu’il est là.» Il ne m’en faut pas plus pour que mon esprit se recueille et que le renflement de terre s’offre à mes deux genoux comme un parfait prie-Dieu... Mais s’il n’y a pas de tumulus, pas de croix, pas d’écriteau, même pas ce léger renflement, si vite affaissé et aplati, qui m’indique à moi, défunt de demain, la place du vivant d’hier et si cependant, malgré l’absence totale de signes extérieurs, quels qu’ils soient, je suis amené à me poser, dans le doute, la question terrible: «Peut-être y a-t-il là des morts? oui... des morts dissimulés et que rien ne révèle?»... si je dois, en ce cas, les prévoir, les soupçonner, les chercher, les deviner et les trouver, dans une certitude uniquement morale, et les repérer en quelque sorte, partout et nulle part, contre toute apparence matérielle,... alors j’éprouve une espèce de mal affreux et d’angoisse désolée. Ces morts anonymes m’obsèdent. Je reconstitue leur obscure Iliade.
Pourquoi, plus que d’autres, étaient-ils voués à la radiation complète, irrévocable? Est-ce exprès, intentionnellement qu’ils furent supprimés, sans que l’on en parlât, sans qu’ait été publiée la moindre mention publique de leur décès et du lieu de leur sépulture? Non! Si l’on n’en a rien dit, ce n’est ni par oubli ni par indifférence, mais parce qu’ils étaient trop et qu’on n’a pas eu le temps! Ils formaient un «ensemble», ils constituaient le champ prodigieux et illimité de la future récolte, aussi sont-ils tombés par centaines, par milliers, et bien davantage, comme se couchent sous la faux les innombrables épis, et, de même qu’eux, ils sont demeurés impersonnels par la continuité magnifique et inépuisable de leur chute... Quand on célèbre la beauté de la moisson, s’inquiète-t-on de l’histoire et du passé de chaque tige? Nul ne s’en préoccupe; on ne songe qu’au pain qui nourrira les hommes. Mais il n’est pas défendu à quelques rêveurs équitables retenus en arrière d’essayer de citer, sans les connaître, ces héros innommés qui n’ont pas brillé dans les ordres du jour et qui méritaient, plus d’une fois, d’y figurer, ces soldats simples, sans orgueil, qui par rangées toutes pareilles se sont succédé à terre, étendus roide le jour ou dans les ténèbres, et qui défigurés par l’obus ou par le masque de l’agonie ont tout perdu, jusqu’à leur ressemblance... sur lesquels n’a pu être retrouvée la médaille d’étain attachée à leur poignet par un cordon noir... ceux qui, frappés, ont été mourir à leur aise dans des coins, dans des cachettes où on ne les a découverts qu’au bout d’une ou deux semaines... ou bien qui, broyés par les roues des caissons et les sabots de la cavalerie, offraient une vue insoutenable et qui ont pour ainsi dire exigé eux-mêmes qu’on les inhumât tout de suite, sans les regarder, dans un infernal désarroi, en détournant les yeux d’horreur et de compassion... et ceux encore que l’on a dû, pour plus de hâte, incinérer, comme font les Indiens des bords du Gange qui sont venus ici promener leurs turbans.
Tous ceux-là... c’est sur eux qu’en ces jours d’inexprimable deuil je me penche, avec une torche à la main, pour tâcher de les discerner et de les éclairer dans le gouffre mystérieux de la fosse commune. Pauvres gens! Ils n’ont rien demandé et on ne leur a rien accordé, même pas une planche où soient tracés deux mots. Ils ont été «évacués» sans un merci nominatif. Ils ne sont pas difficiles. D’ailleurs nous sommes sûrs que s’ils retrouvaient la parole ils ne réclameraient pas. Ils diraient: «C’est bien ainsi.» Et cependant, pour leurs parents, pour ceux qui les aimaient, ils seront maintenant des morts plus écartés, très différents des autres, ils demeureront des disparus, ceux qui, à partir d’une certaine date ont cessé de donner signe de vie, sans que malgré toutes les recherches, on ait jamais eu ensuite un seul indice et le moindre détail relatifs aux circonstances et à la façon dont ils ont été rayés du nombre des humains. Leur famille désemparée se sentira éternellement «coupée» d’eux, plus privée de leur absence que si l’on savait où sont présents leurs restes inanimés. Car c’est une oppression à nulle autre pareille—quand il s’agit d’un mort—que d’être «dans le vague» et de se répéter sans relâche: «Où sont-ils?» Voilà la question. Ici? Là? Plus près? Plus loin? En Alsace? Dans les Vosges? Dans l’Aisne? Dans la Marne? En haut? En bas? On s’est battu dans tant d’endroits que l’on est mort un peu partout! Comment savoir? Quel embarras!
Les soupirs montent à nos lèvres et les larmes à nos yeux... Arrêtons-les. Dominons-nous... Regardons ces morts sans fléchir et ne les plaignons pas. Leur anéantissement, qui nous semble plus profond, n’est qu’une trompeuse apparence. Anonymes, ils ont la gloire solide et sûre des forces qui ne sont profitables qu’à la condition de demeurer secrètes. Leurs moyens isolés, épars, remportent le succès du faisceau et de la cohésion, précisément par le sacrifice de la personnalité. Beaucoup plus ambitieux parce qu’ils sont plus détachés, ils n’obtiennent qu’en renonçant, jusqu’à la fin, même après la vie. Grâce à cette manière ils deviennent les sources cachées, mais les plus actives et les plus riches, de la vie nouvelle prête à jaillir, ils sont l’humus, l’engrais miraculeux de l’idéal futur, le terrain spécial de la résurrection, le domaine public de l’immortalité. Quoi? Des tombeaux courants? Des petits carrés? Des morceaux de patrie chichement mesurés, au centimètre? à eux? Des plates-bandes à ces géants? Vous n’y pensez pas?... Ils ont davantage et méritent mieux. Ils sont l’Armée, l’armée innombrable, obscure et magnifique, la masse, la houle, le flot débordant auquel tout appartient: les espaces illimités qu’ils ont couverts de leurs nappes épaisses, toutes les régions qu’ils ont gagnées en y passant, les sols marneux, les craies de Champagne, les dunes de Flandre, les sables mouvants, les pics, les marécages..., toutes ces étendues sont leur bien, leur empire... et c’est à peine suffisant. L’incertitude, l’ignorance même de la place insoupçonnable où ils se sont tous si savamment tapis, communique à leur sépulture un vaste et spécial mystère. Ainsi, respectons, puisqu’ils l’ont voulue, l’énigme de leurs os. Comprenons qu’en acceptant de ne les chercher nulle part, nous les trouverons mieux partout, et ne les rapetissons pas en prétendant les localiser. Vainqueurs posthumes, ils s’assimilent au sol par une liaison plus étroite et justifiée, ils ont la plus pure et la plus certaine des «concessions», parce qu’elle est presque immatérielle. Personne ne peut profaner leurs restes insaisissables. Ils échappent aux méfaits des survivants, aux caprices de l’ingratitude, et leur dépouille n’ayant pas reçu d’éphémères honneurs sera plus longtemps vénérée. Ils auront les soins assidus de la nature dont le tranquille zèle jamais ne cesse et ne se ralentit, dont la mémoire est régulière. Sur eux l’herbe verte, les fleurs, la neige et les feuilles mortes seront toujours renouvelées.
Aussi ne pourra-t-on plus fouler un champ, se baisser sous les branches, traverser une prairie... regarder simplement à terre sans ranimer l’image inconnue de ces morts et les envelopper d’un grand manteau d’amour. Nous les sentirons avec nous, plus mêlés à la vie, plus libres, ayant des coudées plus franches que s’ils étaient relégués dans l’enceinte des nécropoles... Ils feront partie des saisons. L’an prochain devant un blé plus beau, devant une vigne plus lourde, on dira: «Ce blé qui mûrit vient du fond de leurs entrailles... Le sang de cette grappe est le vin de leur cœur...»
Et à côté de ceux-là, «des anonymes de la mort», en voici d’autres qu’il faut également tirer de l’ombre et dévoiler: les anonymes de la vie, les discrets acharnés du bien, les modestes du sacrifice et les honteux du dévouement: sœurs de charité, infirmières, médecins, brancardiers, bourgeois, employés, ouvriers, petites gens, passants de la rue et des abords de la bataille, dont la guerre a fait des héros qui refusent d’être en vedette.
Dans l’ordinaire, ils étaient «comme tout le monde». Mais la pitié, la douleur, la colère patriotique, la furie de la compassion les ont soudainement révélés aux autres et à eux-mêmes.
Quand la ville a été un matin secouée de terreur, qu’on a dit: «Ils arrivent!» que sous l’aboiement des premiers boulets les habitants se sont enfuis dans un hallali d’épouvante... les anonymes de la vie, qui auraient pu partir eux aussi et souvent dans d’excellentes conditions, sont restés... d’abord en manière de blâme et de reproche à la panique, et puis pour étayer ceux qui étaient forcés de demeurer, que tout et rien ne retenaient sans doute, mais qu’une irrésistible puissance de tendresse et de déchirement clouait et attachait à leur cité, au quartier, à la maison, à la chambre, à leur bien, à ce qui avait été jusqu’à ce jour leur courte joie sur la terre... Ceux-là méritaient maintenant qu’on les aidât, qu’on ne les lâchât pas... Au noble soin de rallier leur détresse et de protéger leur impuissance, ces anonymes se sont voués, de toutes parts, avec un courage qui imposera l’admiration et le respect pour des siècles. Des femmes, des jeunes filles de hardiesse virginale, des timides citoyens galvanisés de bravoure, des prêtres, des vieillards, des hommes de devoir, de sagesse et d’autorité ont surgi d’entre les blessés et les morts, sont nés des cendres et des ruines, pour être à la hauteur du désastre et pour élever les âmes au-dessus des panaches de l’incendie. Rien ne leur fut impossible. Organiser la résistance et le salut, atténuer le ravage, aller au-devant de l’ennemi sans attendre qu’il vienne à vous, avoir mieux que du cœur: de la tête, parler la voix tranquille et les yeux clairs aux officiers casqués, discuter avec eux, débattre pied à pied le chiffre de l’impôt du sang et s’offrir soi-même en otage, faute de mieux; donner sa vie en caution, tomber enfin d’accord forcé sur la somme et courir par les rues fumantes la quêter, la réunir, la rapporter en tas et puis subir alors des exigences nouvelles, être pressuré davantage, contraint de retourner obéir à ces prétentions exorbitantes, et au milieu de tout cela, que l’on réussisse ou que l’on échoue, se maintenir en belle allure morale et en dignité française... quoi qu’il puisse arriver!... c’est ce qu’ont fait pendant des jours et des semaines, des êtres surhumains, merveilleux, qui se sont multipliés, épuisés en marches, en paroles, en raisonnements, en discussions serrées, en ripostes troublantes, qui ont accompli des prodiges d’adresse, d’éloquence palpitante et fière pour essayer, sinon d’attendrir, du moins d’ébranler et de convaincre le Teuton... et qui plusieurs fois, par la logique, la raison, le bon sens, le tour et la présence d’esprit de leur volonté, y sont presque parvenus... Autre guerre dans la grande, et faite, elle aussi, sous les balles, pendant qu’éclatent les obus, que crépitent les toits en flammes.
Et ce sont toujours ces mêmes anonymes qui, entre les chevaux des uhlans, ont suivi à pied, ont été conduits hors de la ville nu-tête, au vent du désastre, comme dans les peintures du moyen âge, qui ont été menacés du fusil, de la corde et du revolver, que l’on a mis en joue et que l’on a relâchés... quand on a vu qu’ils n’avaient pas peur.
Faut-il aussi parler des secours matériels, spirituels, des remèdes, des soins, des soupes, des viatiques de toutes sortes qu’ils ont portés parmi les éboulements? des victimes qu’ils ont sauvées in extremis, des réfugiés qu’ils ont retirés des caves après qu’ils les y avaient cachés, des prêtres et des médecins qu’ils ont été quérir à tout prix et qui sont venus, par le plus court chemin,... des enfants qu’ils ont ravis sous leurs manteaux, dans une fuite atroce, comme s’ils les volaient?... Pensez-vous aux escaliers de maison vacillante, de tours prêtes à crouler, de clochers et de souterrains montés et dégringolés, quatre à quatre, sous la pluie d’enfer...? Et les nuits sans sommeil, prolongées à tant écouter! où l’heure est martelée chaque minute, chaque seconde par un abominable fracas qui ne se tait jamais! Et les prières suprêmes! les baisers du dernier soupir! les sanglots retenus quand on n’en peut plus et que l’on se croit au moment décisif et convoité de paraître devant Dieu... Enfin! Enfin! Plus de terre!
Eh bien, après avoir vécu toutes ces grandeurs et toutes ces horreurs, et en avoir triomphé, par miracle, après avoir vu venir et repartir l’Allemand, après avoir espéré, désespéré, souffert l’inimaginable et surmené toutes les forces de leur corps et de leur cœur... les «anonymes de la vie» ne veulent pas qu’on en parle, à eux ni à personne... Vous les interrogez, vous leur demandez: «Qui êtes-vous? Votre nom?—Inutile, vous disent-ils, nous ne sommes rien. Ne me nommez pas, je vous le défends.—Mais pourquoi? Il faut pourtant bien que j’apprenne à l’univers qui a fait toutes ces actions?—Non. Ou alors, dites que c’est la Ville! C’est Reims, c’est Lille, c’est Arras. Ce n’est pas nous. Nous autres nous disparaissons. Nous avons joué notre rôle. Ne nous recherchez pas. Nous rentrons dans les catacombes, dans la cellule de notre vie.»
Ah! cela! c ’est le sommet du magnifique, le sublime qui déconcerte! Puisque vous aussi, humbles et glorieux combattants, vous voulez, comme la foule des soldats tombés, rester à l’écart et dans l’ombre après la bataille, nous exaucerons votre vœu. Mais malgré vous, plus tard, le secret percera... Si vite qu’en vous effaçant vous glissiez dans l’avenir, par les rues de vos villes dévastées et reconstruites, le long de vos cathédrales toujours debout, on saura vous deviner. Vous ne passerez plus qu’au milieu d’un murmure ardent de reconnaissance. On vous désignera d’une main qui bénit: «Celui-là, cet homme à barbe blanche... Cette mère et sa fille... au tournant du parvis... Ils en étaient... Sans eux!... Ce sont nos bienfaiteurs! les sauveurs, les gardiens de la cité!
Henri Lavedan.
M. Raymond Poincaré vient, pour la seconde fois, de passer quelques jours au milieu des troupes: voyage de bon augure, qui a coïncidé avec d’heureuses nouvelles du front, et qui a été marqué, pour le président de la République, par deux visites d’un haut intérêt.
Arrivé à Paris le jeudi 29 octobre, M. Poincaré consacrait tout d’abord ses deux premières journées de séjour à visiter les gares où passent les blessés, divers hôpitaux où ils sont soignés, à rendre hommage, à la veille de la Toussaint, aux morts inhumés dans les cimetières militaires des environs de Paris. Samedi, guidé par le général Galliéni, le chef de l’Etat parcourait plusieurs sections du camp retranché de Paris, s’intéressant à l’installation des travaux de défense, descendant alertement dans les tranchées, et surtout félicitant chaleureusement les nombreux territoriaux qu’il rencontra à leur poste, de leur entrain, de leur zèle, de leur patriotique dévouement. Enfin poussant jusqu’aux champs de bataille de la Marne, il y saluait de nombreuses tombes de combattants anglais ou français.
Le lendemain, dimanche, M. Raymond Poincaré partait pour Dunkerque. M. Millerand, ministre de la Guerre, l’accompagnait. A Dunkerque, ils rencontraient lord Kitchener, ministre de la Guerre britannique, M. de Broqueville, ministre de la Guerre de Belgique, et, tout naturellement, le général Joffre. Des longs entretiens qui eurent lieu résulta, plus que jamais, la certitude d’un accord complet entre les alliés. Le soir, le président retenait à dîner M. de Broqueville et lord Kitchener. Puis, dans la nuit, le chef du War Office repartait pour Londres.
Lundi, le président de la République, en compagnie du ministre de la Guerre, du général Joffre et du général Duparge, secrétaire général de la Présidence, franchissant la frontière, se rendait en Belgique saluer le roi des Belges et sa vaillante armée. Le roi Albert, informé de ce projet, était venu au-devant de ses hôtes jusqu’à la frontière. Rien ne saurait dire la cordialité, la chaleur de cette entrevue, en un pareil moment. En termes émus, M. Poincaré exprima de nouveau à l’héroïque souverain sa fervente admiration, celle de la France entière pour la magnifique attitude de la nation et de l’armée belges groupées derrière leur roi, et les vœux que tous nous formons pour la Belgique, dont la cause, autant que la nôtre, nous est sacrée; le remerciant, le roi Albert fit un vif éloge de l’armée française. Puis il conduisit, en automobile, à la résidence royale, le président, qui put offrir à la reine ses respectueux hommages.
De là, les deux chefs d’Etat, avec les deux ministres de la Guerre et le général Joffre, gagnaient Furnes, que nos avions protégeaient contre les taubes. Des troupes, belges et françaises, étaient massées sur la place de l’Hôtel-de-Ville. Le roi et le président, aux accents de la Marseillaise et de la Brabançonne, les passèrent en revue. Une longue et affectueuse entrevue suivit, dans l’un des salons de l’Hôtel de Ville, à la suite de laquelle le roi tint encore à reconduire M. Raymond Poincaré aussi loin que possible, dans la direction d’Ypres, où opèrent avec une endurance, une ardeur admirables, des troupes françaises au milieu desquelles le président, le ministre de la Guerre et le généralissime allaient terminer leur journée.
LETTRE DE NOTRE ENVOYÉ SPÉCIAL DANS LE NORD
31 octobre 1914.
Je voudrais que L’Illustration me permît de donner à cet article le premier titre que j’avais choisi: Chez les poilus du...
Le terme vous crispe un peu la bouche?
C’est que vous n’avez pas entendu le jeune chef qui les commande prononcer: «Mes poilus!» Il articule cela avec une soudaine camaraderie, en avançant légèrement le menton et en arquant les lèvres; il appuie sur les syllabes, hausse le ton, sourit des yeux, paraît, à la fois, se contraindre à la trivialité et résister au souffle d’orgueil qui l’entraîne,—et le mot, aussitôt, vous entre dans l’esprit avec l’état civil qu’il faut pour qu’on ne lui discute plus le droit de se faire une place dans votre vocabulaire. Si vous aviez entendu le colonel P... le lancer, vous l’emploieriez sans gêne et vous en éprouveriez une satisfaction pareille à celle qui vous saisit en revêtant un costume qui vous sied ou en maniant un objet nouveau dont la forme vous enchante.
Et si vous connaissiez les poilus, donc!
Je veux vous en parler, parce que, durant cette semaine où le souvenir de nos morts nous obsède, où l’atmosphère porte la mélancolie renouvelée qui nous vient des journées étroites qui accourent et des anciennes tristesses qui remontent, où, cette année, il y aura tant de voiles et tant de larmes, où, déjà, nous ne nous défendons plus d’appréhender l’ère des deuils qui suivra le temps glorieux de la Victoire, je dois à ces diables terrés de telles heures d’enthousiasme et une allégresse si réconfortante que je voudrais vous les communiquer.
Vous vous imaginez que la vie dans les tranchées est lugubre, que les visages y sont marqués de chagrin, que les épaules s’y voûtent, que le meilleur de notre gaieté est noyé, qu’il n’y a de place que pour les entretiens sévères et pour les chuchotements?
Détrompez-vous, sous peine de faire injure à nos frères qui combattent. Les héros de notre pays n’ont pas, d’ordinaire, cette allure de condamnés. Ce sont de simples hommes, un peu plus gais que de coutume, qui s’accommodent sans façon de tout ce qu’ils ne peuvent éviter de désagréable et qui, pour le reste, se «débrouillent», chacun d’eux selon ses facultés.
Je reviens de chez eux les muscles retrempés, l’esprit fouetté, le cœur gonflé, la tête bourrée d’histoires, mais je ne puis me faire à cette idée que, sous l’invisible réseau des obus et des balles, posté en pleine bataille, je n’ai rien vu de la bataille. Des champs vides, des moulins à vent démolis, des bois au pied desquels jaillissent à l’improviste les bouquets noirs des gros obus ou bien de petits nuages blancs qui s’accrochent subitement à la lisière, se gonflent et disparaissent... C’est tout ce que l’on surprend de la bataille! Quant à ce que l’on entend, c’est une autre affaire...
Mais je veux vous parler des poilus!
Il y avait fête chez eux, l’autre jour. On décorait un jeune aide-major qui, en pleine action, aux environs de Capy, était allé ramasser des blessés et s’était trouvé pris dans une dégelée de mitraille. Ils étaient trois ou quatre à sa mesure qui, sans se préoccuper de la musique infernale du plomb et de l’acier, acharnés à leur tâche, faisaient des pansements comme à l’hôpital, quand un shrapnell éclata au-dessus d’eux; on se regarda, on se compta, quelqu’un envoya un bon mot et l’on se remit à la besogne. Mais un autre projectile arriva; celui-ci était un obus qui tomba au milieu du groupe, tua des blessés, en blessa d’autres à nouveau et coucha tout le monde. Le médecin-major, qui commandait le service, se redressa et, s’apercevant que son aide ne mettait pas assez de hâte à l’imiter, lui cria:
—Dites donc, cher ami, la pause n’a pas sonné!
Et l’autre de répliquer paisiblement:
—Pardon, monsieur le médecin-major, mais je crois que j’ai l’humérus brisé.
C’est, ma foi, une belle réponse de médecin qui ne perd pas l’esprit!
Il avait bien l’humérus brisé... les «circonstances» n’avaient pas troublé son diagnostic.
On l’a décoré cette semaine.
Quelques jours avant, le colonel P... lui avait écrit: «Vous avez la croix. 340 Je pourrais vous l’envoyer à l’ambulance; je préfère vous la remettre sur le front. Vous nous manquez, nous serons tous contents de vous revoir...»
Et l’on a conduit l’aide-major Lucien sur le front, sur le front même, à 600 mètres des tranchées allemandes, avec prise d’armes et drapeau déployé.
L’arrivée du colonel: devant le drapeau déployé, se tient le héros de la fête. | La visite de l’aide-major Lucien à ses camarades, après la cérémonie. |
UNE CÉRÉMONIE MILITAIRE SUR LA LIGNE DES TRANCHÉES.—La remise de la croix de la Légion d’honneur à un aide-major blessé.
J’étais de la fête et c’est une des plus belles fêtes de ma vie. Jamais je n’ai vu plus de grandeur dans pareille simplicité, jamais semblable cérémonie n’avait revêtu pour moi une telle signification! Et jamais, non plus, le drapeau ne m’avait paru plus clair, plus gai, plus crâne, plus beau, plus chérissable que sur cette route, au milieu de ces cultures, dans cette plaine, au-dessus de laquelle, inlassablement, depuis trois semaines, court le métal porte-destin.
Pour atteindre l’endroit qu’avait choisi le colonel, il fallait descendre à l’orée d’un boqueteau et franchir un joli petit espace dénudé que les poilus de là-bas connaissent bien et qu’ils n’abordent jamais sans grommeler: «Attention au fou!»
Mais vous ignorez ce qu’est le fou? C’est un Boche qui est perché sur un arbre et qui tire sur tout ce qui s’agite de ce côté. Ils sont peut-être plusieurs: n’importe! On prononce en entendant le sifflement d’une balle: «Encore des nouvelles du fou!» Il serait, d’ailleurs, parfaitement injuste de ne pas reconnaître que le fou est un excellent tireur; le soir de ce jour-là, nous avons rencontré un soldat qui pouvait l’affirmer, preuve au bras,—et la preuve était chaude.
Nous étions bien une vingtaine qui devions traverser la région exploitée par ce maniaque et il y aurait eu, pour lui, un joli tableau à faire; mais il faut croire que le perché mangeait sa soupe ou qu’il ne voulait pas troubler notre fête. Nous passâmes par petits groupes, à peine inquiétés par quelques mouches, qui sont nombreuses cette année; à 200 mètres de là, le piquet d’honneur avait pris les armes.
On aurait dit que chaque homme avait conscience du bon tour qu’on jouait aux voisins. Les visages étaient épanouis, les yeux avaient des éclairs malicieux; on s’amusait, allons!
Le colonel, lui aussi, prenait du bon temps. Pourtant, c’était le moins insouciant; il aurait été si désolé qu’il y eût de la casse! De temps à autre, l’oreille tendue, il levait les yeux vers la cime des arbres...
Une brindille se détacha d’une branche et tomba.
Enfin, la compagnie sortit de la tranchée, s’aligna et, aussitôt, un commandement éclata:
—Présentez... arme!
A cet instant, le drapeau apparut sur la route.
On ne vit plus que LUI et je m’imaginai que, là-bas, tout près, on devait suivre le jeu de son étoffe dans le vent. Il me semblait immense, il me semblait éclatant: il était immense, il était éclatant et l’officier qui le portait ne le diminuait pas.
Coupait-on encore du bois à la cime des arbres?... Nous ne nous en préoccupions plus.
Une bordée de notre 75 nous calotta. Nous nous trouvions dans la ligne de tir et le son nous arrivait, sec et dur, à croire que nous avions la batterie à 100 mètres et que nous en recevions le souffle.
Et, pendant que le canon continuait à cogner, la parade se déroula, sans hâte, sans bravade, strictement, gravement et gaillardement, à la française! Le petit aide-major que l’on décorait était peut-être celui qui dissimulait le mieux son émotion; il se tenait devant le drapeau, sans plus de gêne que s’il se fût trouvé dans son laboratoire... J’avais oublié de vous informer que c’était un agrégé de Nancy, un intellectuel, comme l’on disait. Lorsque le drapeau défila, il lui adressa un beau salut de la main gauche, à la manière d’un vieil invalide qui est bien empêché de saluer de l’autre main; il n’avait plus du tout l’air d’un intellectuel.
Ensuite, le colonel, qui nous avait priés à déjeuner, nous introduisit dans la salle à manger qui est de construction et de style 1914: trois marches pour y pénétrer, des murs uniformément bruns—terre de Sienne, si vous voulez—un plafond aux poutres apparentes sur fond de gerbes de blé, assez haut pour permettre au plus bel homme du régiment de se tenir debout sans courber la taille... Coquetterie: la table, à la nappe blanche immaculée, était parée de fleurs.
Voyez-vous, il y a des détails qu’on ne trouve que chez nous et qui sont la marque de notre âme.
Ces fleurs, sur cette table, dans une tranchée perdue au milieu des champs de betteraves et des labours, loin de tout jardin, citait la plus délicate joie des yeux pour excuser le plus détestable des menus. Elle assaisonna le plus délicat des repas de guerre et je me souviendrai de ce poulet Marengo avec autant de gratitude que je me rappellerai le corton dont on l’arrosa.
Par un bienheureux hasard, la batterie qui était devant nous annonçait chaque service et, quand nous en fûmes au dessert, les gros canons se mirent de la partie.
Alors le colonel se leva et porta un toast, très court, très noble...
C’est vraiment une jolie figure que cet homme-là! Dans le labyrinthe de ses taupinières, sur sa route ou sur le banc de terre de son «bureau», parmi ses hommes ou parmi ses officiers, il apporte partout une bonne grâce limpide et aisée, une politesse mesurée, un souci d’élégance de parfait homme du monde, mais tout cela marié à quelque chose de discrètement strict et de martial qui chasse toute pensée de frivolité. Ce matin d’octobre, quand, debout et le verre en main, il articula le mot France, il me parut que le mot, qui avait tremblé dans sa gorge, nous frappait en pleine poitrine.
Les circonstances y étaient pour leur part, bien sûr,—et le décor aussi. Mais le ton et l’homme y étaient pour la leur. C’était un gentleman qui s’exprimait,—et mieux: un gallant gentleman.
Je ne vous ai pas encore entretenu de ses poilus! Je voudrais vous en parler comme il en parle lui-même; ce serait rendre hommage aux meilleurs soldats de France, à ceux de ce régiment et à ceux des autres corps, à tous ceux qui vont au feu sans forfanterie, carrément, gaiement, et à tous ceux qui, entre deux charges, se sont organisés, dans leurs galeries souterraines, une existence de petits propriétaires troglodytes,—chasseurs à l’affût toujours en éveil, silencieux, joyeux et passionnés trappeurs.
Gaston Chérau.
(A suivre.)
Un groupe d’ennemis, tués net par un seul obus explosif de 75, semblent dormir, dans des poses naturelles, au pied d’un tas de bois.
IMAGES DE GUERRE MODERNE
M. Poincaré. |
Général Galliéni. |
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Le président de la République félicite de leur zèle les territoriaux qui travaillent aux retranchements. |
Le Président et les généraux sont descendus au fond d’une tranchée. |
Une tranchée-type d’infanterie. Lecture sur place de la carte. |
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LE GÉNÉRAL GALLIÉNI FAIT VISITER AU PRÉSIDENT
DE LA RÉPUBLIQUE LE CAMP RETRANCHÉ DE PARIS Voir l’article, page 339. |
Sur la place de l’Hôtel-de-Ville, à Furnes (Belgique), l’automobile où ont pris place côte à côte le roi des Belges et le président de la République française passe sur le front des troupes qui saluent.
Le Président et le Roi. | Général Joffre. |
LE ROI ALBERT, LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET LE GÉNÉRAL JOFFRE A FURNES
Voir la gravure de première page et l’article, page 339.
Ces deux soldats fraternellement unis, et pourtant si dissemblables, ont une bien belle histoire. La voici:
Dès les premiers jours d’août, quand éclata la guerre, le père D..., un fils d’Auvergne, devenu petit commerçant dans la banlieue de Paris, parut se transformer. Vieux sang ne saurait mentir. Il se souvenait de son service militaire, au Tonkin, et aussi qu’il avait eu un oncle tué à Reichshoffen. En dépit des objections des autorités et de son épouse, il réussit à fonder une garde civique. Des individus à mine équivoque rôdaient par le pays. Le fusil de chasse à l’épaule, le père D... aperçut un jour un promeneur suspect. Par trois fois, il le somma vainement de montrer ses papiers. Alors coup de feu à chevrotines... Le père D... s’approcha. L’homme était à terre. Dans ses poches, des statistiques, des plans de forts. Le maire, le commissaire spécial furent mandés. On se transporta au domicile du personnage. On trouva un uniforme de capitaine de la landwehr et l’ordre de rejoindre son régiment à Paris! Le vieux chasseur fit un cran à sa ceinture: il avait tué son premier Boche.
Mais ce n’était là qu’un préambule. Une obsession tourmentait le père D... Il en avait bien touché un mot à son épouse, mais la digne femme avait poussé les hauts cris. Et ses affaires, et ses enfants, et elle-même! La guerre! A cinquante ans! Mais il était fou!
Un jour, enfin, il n’y tint plus et se présenta au bureau de recrutement. On était peu disposé à l’écouter; mais il montra tant d’éloquence qu’on finit par accepter ce vétéran à la barbe plus blanche que grise, au nez orné d’une paire de lunettes.
Vers la mi-septembre, le père D... se trouvait sur le front. C’est ici que l’épopée commence. Simple soldat à son arrivée au régiment, il était promu caporal huit jours après, sergent dix jours plus tard. Désirait-on des volontaires pour un coup de main? C’était toujours le père D... qui de sa voix caverneuse répondait le premier: «Présent!» Signalait-on là-bas, dans la tranchée, un tireur boche trop adroit? C’était lui qui se chargeait de le descendre. Le régiment donnait-il tout entier à l’attaque? C’était encore lui qui se glissait au premier rang. Il fut, avec son colonel, un brave entre les braves, le merveilleux entraîneur de son régiment. Ce vieil homme, par son humeur endiablée, son insouciance, son courage, donnait l’exemple à tous. Les jeunes recrues lui demandaient conseil et ne redoutaient rien tant que son blâme. Les trembleurs n’osaient se montrer devant lui. Au fait, depuis qu’il était là, il n’y avait plus de trembleurs!
Voilà que l’assaut est ordonné contre une position qui domine ces profondes carrières à sangliers où les Allemands se retranchent. La nuit tombe. La tâche sera rude. Le colonel s’est porté en avant. En tête des éclaireurs, il aperçoit le père D..., le corps plié, le fusil à la main, l’œil aux aguets...
—Encore toi!
—Toujours moi, mon colonel.
—A ton âge! Mais tu n’es pas à ta place, ici!
—Vous non plus, mon colonel!
—Tais-toi! Je te fais adjudant!
... Beaucoup sont demeurés sur le plateau jonché déjà de tant de cadavres! Mais la position a été enlevée à la baïonnette. Hélas! le vieux sergent n’aura pas vu la victoire. A 1.200 mètres de la ligne de tranchées, il a tiré le premier coup de fusil sur une ombre imprudente. La tache noire s’est effondrée. Les obus, les fusils, les mitrailleuses ont riposté. Un shrapnell a décoiffé d’abord le père D..., effleurant son crâne. Le sang coule et l’aveugle:
—Hardi! les enfants. Et, si je tombe, ne perdez pas la direction. Le groupe d’arbres, à gauche du croissant de la lune!
Il n’avait pas achevé qu’une balle lui brisait l’avant-bras droit. Il tomba.
—Veux-tu bien me laisser là! A gauche du croissant, je te dis!
Il n’est plus bon à rien pour aujourd’hui... Rampant à travers les betteraves, il a pu réussir à regagner la crête du plateau où des ambulances l’ont recueilli.
Dans le train de blessés, le père D... a retrouvé sa bonne humeur:
—Une fracture, les gars! une simple fracture! Le sang est bon. D’ici vingt jours, tout ça sera raccommodé. Comme adjudant, plus de fusil à porter. J’aurai quand même plaisir à en descendre encore quelques-uns. La musique des «boîtes à singe» et du «moulin à café» commence à me manquer!
En style de guerre 1914 on désigne sous ces vocables l’obus et la mitrailleuse.
A chaque station, le père D... baise galamment les mains des demoiselles de la Croix-Rouge qui lui offrent de bonnes choses... Mais une ombre passe sur son visage... Il soulève son képi et grattant, de son geste familier, cette dure caboche auvergnate que les obus allemands n’ont pu entamer:
—Tout de même, qu’est-ce que va dire ma femme quand je rentrerai à la maison?...
Dans l’hôpital où est maintenant le père D... se trouve un autre engagé volontaire, mais de la plus jeune génération, celui-là. Il n’a que dix-sept ans. On appelle l’un le «vieux», et l’autre le «gosse». Ce «gosse», enfant de Lorraine, a aussi quelques exploits à son actif. Un Prussien qui avait réussi, un jour, à gagner nos lignes afin de se faire capturer, assura que nombre de ses camarades l’imiteraient volontiers. Le gamin, qui parle l’allemand, s’offrit pour l’accompagner jusqu’à la tranchée d’où il s’était échappé. Au crépuscule, le plan fut exécuté. Devant la tranchée que nul officier ne surveillait à cet instant, Français et Allemand vantèrent les charmes de la captivité. Plus de coups de schlague, une bonne nourriture, finie la corvée! Dix-huit lâches se laissèrent convaincre et abandonnèrent leur poste pour les suivre... Le cortège désarmé se mit en marche... Mais bientôt les autres Allemands, revenus de leur surprise, ouvraient le feu... Une batterie entra même en action:
—Je franchissais nos lignes avec mes dix-huit prisonniers et mon guide, raconte le «gosse», quand j’entendis siffler un obus. J’ai trop d’expérience pour ne point connaître à l’avance où un obus va tomber. Celui-là nous arrivait en plein dessus. Alors, je poussai brusquement mon guide devant moi... Pfuitt! Boum! C’était un bon diable, ce Boche... Il m’avait été utile... Mais que voulez-vous? Il a tout pris!
Lui en fut quitte pour une forte contusion. A l’hôpital, les majors, le voyant surmené, voulurent le rendre pour un mois aux jupes de sa mère. Mais le «gosse» n’entendit pas de cette oreille. Dans quelques jours, avec le «vieux», il retournera au front.
Il y aura, en des temps plus calmes, tout un véritable «romancero» à écrire sur le rôle de l’automobile et la vie des chauffeurs en campagne. Il sera fertile en péripéties émouvantes, et neuves, surtout, et pleines d’imprévu. Que de rencontres étranges ainsi, au coin d’un bois, au détour d’une route, où l’homme du volant dut rivaliser de sang-froid avec son compagnon, son garde du corps! Que de traits élégants où l’esprit français, fertile en ressources, triompha de la lourdeur ennemie et où, grâce à un coup de volant décisif, à l’allumage brusque des phares électriques qui effraie les chevaux, ou enfin à quelques adroits coups de fusil, furent sauvés la voiture et ceux qui la montaient!
LE DÉNOUEMENT D’UN DUEL AÉRIEN: VAINQUEUR ET VAINCU
Dessin de Georges SCOTT, d’après le croquis d’un témoin oculaire.
Si les aviateurs des diverses armées alliées accomplissent chaque jour des prouesses, ces exploits n’ont en général pour témoins que les bataillons ennemis; les nôtres les connaissent seulement par le rapport ou... par les journaux. Pourtant, il n’est pas un soldat du front qui ne rêve d’assister à un combat aérien, prêt à applaudir aux derniers tournoiements de l’avion allemand blessé à mort. De ces rencontres il n’a encore été pris, il ne sera peut-être pris aucun cliché. Des indications et un croquis fournis par un spectateur du combat que nous avons déjà mentionné (numéro du 24 octobre) ont du moins permis d’en représenter très exactement la phase finale. C’était à Jonchery, près de Reims. Un avion allemand, du type «Aviatik», après avoir survolé nos troupes, se préparait à regagner son camp. Aussitôt, le sergent Frantz et le soldat Quenault s’envolent sur un biplan armé d’une mitrailleuse. Arrivé à une grande hauteur, l’appareil français attaque son adversaire de flanc: bientôt le moteur de celui-ci explose, déterminant l’incendie de l’appareil qui s’abat lourdement dans les lignes françaises. Des deux côtés les soldats étaient sortis de leurs tranchées pour mieux suivre les péripéties du drame. Tandis que les débris de l’ «Aviatik» achevaient de flamber près de deux corps carbonisés, ils virent le biplan français descendre majestueusement, en décrivant de grands orbes autour du brasier.
LES FUNÉRAILLES DU ROI CAROL Ier DE ROUMANIE A BUCAREST
Le char funèbre, suivi par le cheval favori du souverain,
par le nouveau roi Ferdinand Ier (que désigne le signe ×), marchant
entre ses fils, les princes Carol et Nicolas, et par un immense cortège, passe
sur le grand boulevard Lascar-Catargiu.
Photographie C.-G. Basiliad, prise le 12 octobre, et
parvenue à Paris le 30 seulement, par suite des difficultés des communications.
LE GOUVERNEMENT BELGE AU HAVRE.—Une cérémonie quotidienne: chaque matin, devant l’hôtel affecté au ministère de la Guerre de Belgique, les couleurs nationales belges sont hissées au sommet d’un mât et saluées par la garde ainsi que par le personnel et les officiers du ministère.
29 octobre-4 novembre
La bataille continue avec une violence croissante sur tout l’immense front de la mer du Nord à la plaine d’Alsace; mais entre la Lys et la mer se joue sans doute la partie décisive. Si ardente que soit la mêlée dans beaucoup de régions, nulle part autant d’hommes ne sont aux prises; nulle part autant de races humaines ne participèrent à une guerre; nulle part aussi une telle accumulation de moyens d’attaque et de défense n’a encore été constatée. La bataille du droit et de la civilisation contre la barbarie a recruté des soldats jusque parmi les peuplades variées de l’Inde, les Arabes et les Berbères de l’Afrique du Nord, les nègres de l’Afrique occidentale. Les navires de l’Angleterre et de la France prennent une part considérable et glorieuse aux combats sur la terre ferme; l’aviation y participe par des flottes aériennes plus considérables et plus agissantes que celles jusqu’ici mises en ligne. Lorsqu’on connaîtra par le détail tous ces événements qui nous sont à peine révélés, les fictions les plus extraordinaires de Jules Verne et de ses imitateurs paraîtront bien dépassées.
Toute la semaine, les Allemands ont déployé une activité confinant à la furie. Ce n’est pas seulement vers Dunkerque et Calais qu’ils ont voulu percer: leurs opérations contre Arras paraissaient menacer Boulogne; en Picardie, ils voudraient trouer dans la direction d’Amiens; sur l’Aisne, on dirait qu’ils veulent retourner vers l’Ourcq et la Marne; par l’Argonne, la Meuse et la Woëvre, ils tentent d’envelopper Verdun; enfin du côté de la Seille, ils poussent de nouvelles pointes sur Nancy. Chaque jour les communiqués employaient les mêmes termes: «Violentes attaques sur tout le front.» Ces attaques ont été presque partout infructueuses, malgré l’effrayante consommation d’hommes qu’elles ont demandée à l’ennemi. C’est à plus de 200.000 que le colonel Repington, du Times, évalue le nombre des soldats sacrifiés par le commandement allemand depuis un mois. Cette semaine particulièrement sanglante s’est achevée par des symptômes de victoire qu’a soulignés la visite du président de la République à nos vaillantes troupes et par l’excursion sur le front même de la bataille, accomplie par M. Poincaré en compagnie de l’admirable roi des Belges.
Les Allemands ont d’abord porté leur principale action sur les bords de l’Yser, entre l’embouchure du petit fleuve et Dixmude. Grâce à des masses sans cesse renouvelées ils avaient pu franchir le cours d’eau, et même dépasser le chemin de fer en occupant Ramscappelle et Perwyse. Les troupes belges ont eu recours à la mesure suprême des inondations: rompant les digues de l’Yser, tendant les barrages, nos amis ont amené le flot insidieux dans la plaine basse des polders. En même temps, aidés par nos troupes, ils enlevaient les villages occupés, et, sur les chaussées dominant les eaux, ont refoulé les colonnes ennemies du côté opposé, en leur infligeant des pertes considérables. Aux dernières nouvelles, Belges et Français avaient à leur tour traversé la rivière et se portaient vers la route d’Ostende à Dixmude où déjà serait parvenue à Leffinghe une colonne qui longea les dunes, tandis qu’une autre occupa Lombaertzyde le 3 novembre. Nous sommes donc près d’Ostende.
Devant cette difficulté de se diriger vers la frontière française par le littoral, devant l’inondation qui gagne chaque jour, l’ennemi a porté son effort vers le Sud, contre la ville d’Ypres. Ne pouvant aborder celle-ci par le Nord, ayant été chassé de Dixmude réduit en cendres et se trouvant en présence de forces alliées victorieuses occupant, entre Ypres et Roulers, les bourgs de Langemarck et de Parschendaele, il a dû se diriger sur un front étendu entre Roulers et Menin, où il a engagé de nombreux corps d’armée; depuis lors, c’est au Sud-Est et au Sud d’Ypres que la bataille a lieu; elle fut particulièrement ardente entre le canal d’Ypres à la Lys et le ruisseau de la Douve, autour du village de Messines, situé à mi-chemin d’Ypres et d’Armentières. Les positions ou points d’appui ont été pris et repris plusieurs fois; Anglais et Français ont rivalisé d’ardeur dans la résistance contre le flot allemand et dans les contre-attaques. Les nouvelles du 4 novembre disaient que nous avions maintenu notre front sur tous les points et que malgré des alternatives d’avance et de recul, nous étions en progrès. Sur le reste du théâtre flamand d’opérations, c’est-à-dire dans la Flandre française, autour des villes populeuses de Lille, Roubaix, Tourcoing, Halluin et Armentières, le silence a été complet, mais quelques indications furent fournies sur les combats livrés par les troupes britanniques aux abords de la Bassée. Les Allemands ont dirigé contre nos alliés de violentes attaques, à l’aide de forces très supérieures en nombre. Un moment obligés de reculer, les Anglais ont repris vigoureusement l’offensive, repoussé l’ennemi et repris position en avant des points d’où ils avaient été chassés. Toutes les attaques qui eurent lieu depuis dans cette direction sont restées infructueuses. Il en fut de même jusqu’à Arras, par les plaines de Lens et de Vimy.
A Arras, qui reste occupé par nous, l’ennemi a fait de violentes tentatives les 1er, 2 et 3 novembre; tout en continuant le bombardement de la malheureuse cité, il a cherché à parvenir au cœur de celle-ci; mais nous tenions bon dans les villages de la banlieue immédiate et les faubourgs; partout l’assaillant a été repoussé.
Les combats se sont poursuivis au Sud d’Arras jusqu’à l’Oise. Entre Arras et la Somme, il semble que tout se soit borné à des attaques contre nos positions, suivies de retours offensifs de notre part, nous faisant gagner quelques points retranchés par l’adversaire. Mais plus au Sud, en arrière, à l’Ouest de Roye et de Nesle, des deux côtés du chemin de fer de Tergnier à Amiens, l’ennemi a renouvelé l’effort entrepris depuis tant de semaines pour tâcher d’atteindre la capitale picarde. Il n’y a pas réussi; c’est nous qui, vers le 30 octobre, avons atteint, aux abords immédiats de Chaulnes, le bourg de Lihons, et, plus au Sud, à quelque distance de Roye, le village du Quesnoy-en-Santerre.
Contre le rideau ainsi avancé vers l’Est, les Allemands ont dirigé de furieuses tentatives, pendant trois jours; jusqu’au 3 novembre, tous leurs efforts se sont brisés contre la ténacité de nos soldats appuyés par notre puissante artillerie; même, le 4, nous faisions un nouveau pas vers l’Est.
Ligne générale (en grisé) des opérations militaires, à la fin d’octobre, de la mer du Nord à Nancy.
Voir aussi la carte de la couverture et, pour la bataille des Flandres, le croquis panoramique des pages 350-351.
UN VILLAGE DEUX FOIS PRIS PAR LES ALLEMANDS ET DEUX FOIS REPRIS PAR NOTRE INFANTERIE
Dessin exécuté par M. Sydney Adamson, à Sommesous (village de la Marne, non loin de Vitry-le-François), d’après les indications précises d’officiers ayant participé aux combats de septembre sur ce point et qui ont certifié exacte la composition de l’artiste anglais.
356
Sur l’Aisne, des événements auxquels les communiqués allemands ont donné une importance vraiment excessive se sont produits en amont de Soissons, autour de la petite ville de Vailly. Nous avions entrepris sur les plateaux de la rive droite de la rivière une marche en avant qui, heureuse entre la forêt de Laigue et Soissons, a échoué sur les plateaux au Nord de Vailly—près de Condé—nos colonnes s’étant heurtées à des forces très supérieures. Cet insuccès fut compensé le 1er novembre par l’échec des Allemands qui tentaient de poursuivre leur avantage par des attaques de jour et de nuit. Le 2, les Allemands, une fois encore renforcés, nous faisaient reculer sur la rive droite de l’Aisne jusqu’à Bourg-en-Comin, en amont de Vailly; mais mardi nous reprenions l’offensive et approchions de Bray-en-Laonnois par la reprise de la ferme du Metz. Depuis lors notre avantage s’affirme.
Sur le reste du front, en Champagne, les Allemands ont manifesté une recrudescence d’activité se traduisant surtout par une violente canonnade à l’aide de leur artillerie lourde et la reprise du bombardement de Reims. Plus à l’Est, du 30 octobre au 2 novembre, nous avons gagné de tranchée en tranchée au Nord de Souain, malgré une action d’artillerie presque ininterrompue.
Dans l’Argonne, la bataille commencée la semaine dernière, à travers la forêt, entre Vienne-la-Ville et Varennes, a continué toute la semaine. Les Allemands, pour s’assurer la communication à travers ces grands bois, nous ont attaqués avec fureur; chacune de ces tentatives a été repoussée avec des pertes considérables pour l’ennemi, et, le mardi 3, nous le rejetions au Nord du chemin de Varennes.
Sur la Meuse, dans le massif des Côtes et dans la Woëvre, il n’y a pas eu moins d’activité; les Allemands cherchent évidemment à envelopper le camp retranché de Verdun dans le but d’entreprendre le siège de cette grande place. L’armée qui manœuvre de ce côté, vers Saint-Mihiel, en Woëvre, au Nord de Verdun, a partout tenu l’ennemi à distance et gagné sur lui; elle a dépassé Pont-à-Mousson et, sans doute, atteint la frontière. Au Nord de Verdun, où le puissant fort de Douaumont avait été canonné pendant vingt-quatre heures sans subir, d’ailleurs, le moindre dégât, nos troupes ont obligé les assaillants à évacuer les positions lointaines d’où ils essayaient le bombardement du fort.
Pendant que des détachements français opèrent dans la vallée supérieure de la Seille, vers Château-Salins, l’ennemi a esquissé une contre-offensive contre Nomény au Nord de Nancy; sa reconnaissance a été rudement reçue et rejetée sur le territoire annexé.
Dans les Vosges moyennes, les Allemands maîtres du chaînon du Ban-de-Sapt, qui se dirige du col de Saales vers Raon-l’Etape, bombardaient presque journellement Saint-Dié; une brillante attaque les a rejetés sur le versant alsacien pendant que d’autres forces, franchissant le col de Sainte-Marie-aux-Mines, prenaient possession des hauteurs au-dessus de la petite ville portant ce nom.
La semaine, on le voit, a été marquée par de nombreux événements de guerre, mais c’est vers la Flandre surtout que s’est portée et que se porte encore l’attention.
Peu de nouvelles, cette semaine, mais elles sont excellentes en ce qu'elles montrent les armées allemandes et autrichiennes obligées à une retraite semblable à une déroute. Si, dans la Prusse orientale, les Allemands résistent, grâce au réseau de lacs et de rivières qui entourent Lyck, ils se replient au Sud de la Vistule vers la Wartha, aussi rapidement que le permettent des routes boueuses transformées en fondrières. Ils ont dû abandonner précipitamment la grande ville de Lodz avec tous les approvisionnements qui y étaient réunis, et ils continuent leur navrante retraite, poursuivis par les Cosaques.
Au Sud de la rivière Piliza, les vaincus d’Ivangorod avaient trouvé des terrains de défense dans les forêts qui couvrent ce territoire. Du 24 au 28 octobre, Allemands et Autrichiens résistèrent avec une sombre énergie, mais ils finirent par être rejetés, laissant Radom aux mains de nos alliés. Aux confins de la Galicie, les Autrichiens n’ont pas été plus heureux; ils sont refoulés dans la direction de Kielce et même au delà. Sur le San, des combats ardents ont eu lieu, tournant tous à l’avantage des Russes qui achèvent de réduire la forteresse de Przemysl.
Les hostilités se poursuivent entre les Serbes et les Autrichiens sans qu’aucun résultat décisif soit obtenu. L’intérêt se porte plutôt vers le mont Lovcen et les Bouches de Cattaro. Les batteries françaises, installées sur la montagne, ne tarderont pas à avoir raison des fortifications autrichiennes. Déjà plusieurs forts ont été détruits, et le feu de nos pièces n’aura bientôt d’autre objectif que les navires autrichiens enfermés dans ce golfe étrangement indenté et que bloque la flotte anglo-française.
Un grave événement s’est produit, transportant la guerre jusque dans la mer Noire et dans le désert du Sinaï. Dans la nuit du 28 au 29 octobre, deux contre-torpilleurs turcs, pénétrant dans le port d’Odessa, ont coulé une canonnière russe et canonné le paquebot français Portugal. Dans la matinée du jeudi 29, un croiseur a bombardé la gare et la ville de Théodosia en Crimée. Le même jour, un autre croiseur, le Hamidieh, faisait acte d’hostilité devant Novorossisk, à l’entrée de la mer d’Azov. Cette agression en pleine paix a amené le rappel des ambassadeurs français, anglais et russe à Constantinople, et la remise des passeports aux ambassadeurs turcs dans les trois pays alliés.
Ces événements ont eu leur contre-coup aux confins de l’Afrique et de l’Asie. L’armée russe du Caucase a franchi la frontière d’Arménie, bousculant les postes turcs.
De leur côté, les Anglais, apprenant que les Turcs, avec leurs contingents arabes, se préparaient à attaquer le canal de Suez sous la direction d’officiers allemands, n’ont pas attendu l’exécution de cette menace. Ils se sont portés au fond du golfe d’Akaba, qui, avec le golfe de Suez, entoure la presqu’île du Sinaï, et ont attaqué le fort d’Akaba, bâti à l’extrémité des rivages, sur la frontière même. Cette forteresse, dont un officier allemand, dit-on, organisait la défense, a été rapidement enlevée.
Enfin, à peine la rupture était-elle consommée que la flotte anglo-française allait bombarder les forts des Dardanelles: elle ouvrit le feu le 3 novembre à 5 heures du matin.
Pendant que la grande flotte anglaise maintient dans ses ports la flotte allemande qui devait jouer un rôle si éclatant, et dont aucune grande unité n’ose sortir; pendant qu’une escadre anglaise participe à la bataille des Flandres; pendant que la flotte française est maîtresse de l’Adriatique,—les croiseurs allemands des mers lointaines continuent leurs exploits. Grâce à un odieux subterfuge, en se maquillant en croiseur russe, l’Emden a assailli et coulé à Poulo-Pinang, dans la presqu’île de Malacca, un croiseur russe. Le torpilleur français Mousquet n’a pas craint de s’attaquer au gros navire; mais la lutte était par trop inégale; le vaillant petit bateau a été coulé à son tour.
La guerre s’étend au vaste continent africain. Les Anglais et les Français ont conquis ce Cameroun dont les Allemands étaient si fiers. De leur côté, les Allemands ont envahi l’Angola portugais; la jeune république doit envoyer contre eux une escadre et un corps expéditionnaire. Enfin, dans l’Afrique australe, les Allemands ont soudoyé un traître, le colonel Maritz, qui s’est révolté contre les Anglais. L’ancien général boer, Christian de Wet, s’est joint à lui avec le général Beyers, mais un autre héros de la grande guerre africaine, le général Botha, marche contre les insurgés et en a rapidement raison.
Ardouin-Dumazet.
C’est par suite d’une confusion, nous écrit un correspondant des plus qualifiés, que M. Gabriel Louis-Jaray a attribué à une section de nos admirables alpins la belle défense de Gerbeviller. Les alpins se sont vaillamment battus partout où ils ont été engagés. Mais, à Gerbeviller, c’est une section de chasseurs du 2e bataillon qui tint toute une journée contre des forces considérables. L’adjudant qui commandait cette section est aujourd’hui sous-lieutenant.
PAGES. | |
LES GRANDES HEURES | 338 |
Les anonymes | 338 |
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE A DUNKERQUE ET A FURNES | 339 |
LES HÉROS DE NOTRE PAYS | 339 |
DEUX ENGAGÉS DE LA GUERRE DE 1914 | 344 |
LA QUATORZIÈME SEMAINE DE GUERRE | 353 |
La bataille des Flandres | 353 |
Picardie et Champagne | 353 |
Les opérations russes | 356 |
Dans les pays serbes | 356 |
La Turquie | 356 |
Sur mer | 356 |
En Afrique | 356 |
La défense de Gerbeviller | 356 |
Au lecteur.
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